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fuccés de cette guerre, & qui trembloit pour l'Arche, de peur qu'elle ne fuft deshonorée par les Philiftins, luy qui louffroit avec tant d'indifference qu'elle le fuft encore plus tous les jours par les enfansmefme, entendant un homme qui revenoit du combat luy en demanda des nouvelles. Cet homme luy annonça la défaite de toute l'armée; & lors qu'il luy dit que l'Arche avoit efté prife, ce grand Preftre âgé de prés de cent ans, tomba de fa chaise à la renverfe & fe caffa la tefte. Sa belle fille femme de Phinées, apprenant la mort de fon mary & la prife de l'Arche, étant groffe alors elle accoucha fubitement & mourut fur l'heure. Jamais on ne vit plus fenfiblement combien Dieu vange l'injure qu'on fait aux choses saintes, par l'abandonnement mefme de ce qu'il y a de plus faint, & que rien ne l'irrite tant que les pechez des Preftres, dont la fainteté devroit l'appaiser lors qu'il eft preft de punir Pniquité de fon peuplex Et il apprit ainfi aux Chreftiens, comme remarquent les faints Peres, à ne pas mettre tellement leur confiance dans le plus faint de nos Sacremens, dont l'Arche n'eftoit que la figure, qu'ils n'ayent pas foin en mefme-temps de vivre d'une vie divine pour fe nourrir de ce pain du ciel. Car Dieu ne protege que ceux qui l'honorent, & il ne fait éclater fa gloire, que pour ceux qui fe rendeut dignes de luy

L

Idole de Dagon. 1. Rois 5.

année

'Arche de Dieu ayant efté prise paroiffoit desho-La même norée & avoir perdu tout l'éclat dont jufques-là 1888. Dieu l'avoit toûjours comblée; Mais elle ne fut jamais plus glorieufe, que lors qu'elle fut entre les mains des Philiftins. Dés qu'ils en furent les maiftres, ils la menerent à Azot & la mirent dans le temple auprés de l'idole de Dagon, pour nous representer par ce facrilege le crime de ceux qui veulent allier dans un mefme cœur le culte de Dieu & le culte des Demons. Mais Dieu fit bien voir en cette rencontre qu'il ́n'eft pas femblable aux faux Dieux. Dagon ne put fubfifter devant la prefence de l'Arche, & le lende main on le trouva renversé par terre. Ceux d'Azot eftant furpris & affligez de la honte de Dagon, le releverent & remirent en fa place ce Dieu qui ne s'eftoit pû relever luy-mefme. Mais le jour fuivant on le trouva encore par terre, fans tefte & fans mains. La vengeance de Dieu paffa de cet idole aux idolatres, & tous les habitans d'Azot furent frappez d'une playe honteuse dans les parties les plus fecrettes de leurs corps, par une multitude derats que Dieu fit naiftre dans tout leur pays. Cette playe fale qui les empefchoit de fe pouvoir affeoir par la douleur qu'ils fentoient en cette partie, & qui marque admirablement les playes honteufes & fecrettes du peché, estonna les Azotiens, & ils reconnurent auffi-toft que la caufe de leurs maux eftoit l'outrage fait à l'Arche, plus heureux en cela que ceux qui font infenfibles aux maux dont Dieu punit en eux la profanation des chofes faintes que l'Arche figuroit alors. Ne pouvant donc plus fupporter la prefence de Dieu dont ils éprouvoient fi fenfiblement la puiffance, ils menerent l'Arche dans d'autres villes où elle fit de semblables

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maux. C'eft pourquoy les Philiftins craignant enfin qu'elle ne les fift tous mourir, affemblerent leurs fages & leurs devins, qui leur donnererent un confeil, dont Dieu fa gloire par un monument eternel de la vengeance qu'il avoit exercée fur fes ennemis. Ils ordonnerent qu'on renvoyeroit l'Arche avec un petit coffre où feroient encore cinq figures de rats dont ils avoient esté fi incommodez, avec cinq autres figures des parties fecrettes de leurs corps où ils avoient efté frappez de ces playes. Ainfi parut la gloire de Dieu en cette rencontre, qui fans le fecours d'aucun homme n'eut befoin que de luy feul pour forcer fes ennemis à renvoyer fon Arche fainte de la captivité où elle avoit efté injuftement retenuë. La joye qu'ils avoient fentie lors qu'ils la virent entre leurs mains, fe changea bien-toft en triftreffe, & les maux prefens qu'elle leur caufa leur en firent craindre encore d'autres plus grands. Les hommes doivent apprendre de cette hiftoire, que la joye qu'ils ont quelquefois de tenir fous leur puiffance ce qui appartient à Dieu, fera bien courte, & que s'ils ne voyent pas la playe dont Dieu les frappe, parce qu'elle eft derriere eux comme celles des Philiftins, felon que le remarque S. Gregoire, ils ne doivent point douter que Dieu ne vange toft ou tard l'abus d'une chofe qui luy appartient, par l'opprobre eternel de ceux qui s'en eftoient jujustement rendus les maiftres.

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L

L'Arche renvoyée. 1. Rois 6.

es Philiftins ne pouvant plus fouffrir la prefence de l'Arche de Dieu qui les frappoit de tant de playes, firent felon le confeil de leurs devins un chariot tout neuf pour la mettre deffus, & y attele rent deux vaches dont ils enfermerent les petits ; afin que fi les vaches, malgré l'instinct de la nature, ne laiffoient pas d'aller vers la terre d'Ifraël, ils connuffent par cette violence furnaturelle, que ce n'eftoit point par hazard, mais par un effet vifible de la puiffance de Dieu qu'ils avoient efté frappez de tant de playes. Dieu fuivit en quelque forte la foibleffe de ces perfonnes, & fit que ces animaux furmontant la tendreffe naturelle qu'ils avoient pour leurs petits, traînerent l'Arche fans s'arrefter. Ils la porterent droit vers la terre des Juifs, & devinrent ainfi une admirable figure de la maniere dont on doit aller à Dieu, en s'élevant au-deffus de toutes les affections de la terre. Les Grands d'entre les Philiftins voulurent estre témoins de cette merveille, & ils virent avec eftonnement que l'Arche s'arresta en Bethfamez qui eftoit la premiere ville des Juifs. Le peuple de cette ville fut dans une extrême joye en voyant l'Arche, dont la captivité tenoit tout Ifraël dans le deuil. Mais cette joye fut bien-toft changée en larmes, lors qu'ils virent que ce facré dépoft épargnoit auffi peu les Juifs mefmes, qu'il avoit fait les Philiftins. Dieu punit les regards trop curieux des Bethfamites, & frappa d'entre eux cinquante mille perfonnes, parce dit l'Ecriture, qu'ils avoient veu l'Arche du Seigneur. La frayeur dont ils furent faifis, & la peur qu'ils avoient de mourir tous, leur fit dire en tremblant: Quel eft ce Dieu, & quelle eft fa fainteté, ou qui pourra subsister devant sa face?

H

La memas

année

2388.

Ils envoyerent donc prier ceux de Cariathiarim de venir prendre l'Arche que les Philiftins leur avoient renvoyée. Ils y vinrent & remenerent. l'Arche en Gabao, & la mirent dans la maifon d'Abinadab, où eftant dans le lieu que Dieu s'eftoit choisi pour fa demeure, non feulement elle ne frappa point ce païs des playes dont elle avoit frappé tous les Philiftins, & enfuite les Bethfamites, mais elle le combla mesme de toutes fortes de benedictions; faifant voir fenfiblement que celuy dont elle eftoit la figure ne demande qu'à répandre fes graces fur les hommes quand on n'y met point d'obftacles; mais que lors qu'on irrite fa juftice, il fçait bien faire éclater la grandeur de fa puiffance dans le chastiment de ceux qui méprifent fa bonté. Les Bethfamites sembloient bonorer l'Arche en fe réjoüiffant de la recevoir au milieu d'eux, mais leur joye eftoit fuperbe, parce qu'ils mettoient leur gloire à poffeder ce dépoft facré, fans fe mettre en peine d'obeïr à la loy de Dieu qui y rendoit fes oracles. Ainfi plufieurs, dit faint Gregoire Pape, s'approchent du corps du Fils de Dieu avec une confiance pleine de hardieffe, qui periffent dans fon Sanctuaire; parce que ne travaillant point à rendre leur ame pure pour le pouvoir nourrir de l'Agneau fans tache, ils trouvent la mort dans la fource de la vie.

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