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idolâtre confondoit l'incredulité des Juifs, il peut de mefme arriver fouvent dans l'Eglife que des perfonnes engagées dans le monde feront rougir ceux qui font dans une profeffion plus fainte; & que la fimplicité de leur foy jointe à l'innocence de leur vie, confondra un jour la tiedeur & le peu de foy des autre, dont la vie ne répond pas à l'excellence de leur estat ni aux grandes graces que Dieu leur a faites.

Transfiguration de J.C. Matth. 17.

année 32.

ESUS-CHRIST fe trouvant feul avec les difciples, &La même parcourant avec eux les villes de Cefarée, demanda" à fes difciples ce que le monde difoit de luy. Ils luy répondirent que les uns croyoient qu'il eftoit Jean Baptifte; les autres qu'il eftoit Elie; d'autres qu'il eftoit Jeremie, ou l'un des anciens Prophetes. Et vous, leur dit J.C. que dites-vous que je fuis? S. Pierre alors fans hefiter luy repondit: Vous eftes le CHRIST Fils du Dieu vivant. J. C. l'appella heureux de ce que fon Pere luy avoit revelé cette verité, & il l'aflura qu'il établiroit fi fermement fur luy fon Eglife fainte, que les portes d'enfer ne prévaudroient jamais contre elle. Mais aprés cette grande gloire qui promettoit à faint Pierre d'eftre le chef de l'Eglife, & d'eftre affis un jour fur la chaire de la capitale du monde, fans que fa faute & fon renoncement qui furvint enfuite portaft J. C. à retracter fa promeffe; le Sauveur l'humilia d'une manicre terrible,luy donnant le nom de fatan, parce qu'il vouloit le détourner de fouffrir la croix& la mort:&il fit voir qu'il n'éleve guere fes Saints qu'il ne les abaiffe auffi-toft enfuite, parce que la foibleffe de l'homme cft fi grande, que fi Dieu n'ufoit envers luy de cette conduite, la profperité ou temporelle ou fpirituelle l'éleveroit & luy deviendroit un fujet de chûte. Huit jours aprés que cela fe fut paffé, J. C. prit trois de fes difciples,S.Pierre,S. Jacques & S. Jean,qui paroiffoient toûjours les plus favorifez d'entre les autres, & aufquels il témoignoit plus de tendreffe. Il les mena fur une haute montagne à l'écart, & lors qu'il y prioit il

fut tout d'un coup transfiguré. Son visage devint écla tant comme le foleil, & fes habits plus blancs la que neige. Moyfe en mefme temps & Elie apparurent qui s'entretenoient avec J. C. de ce qui luy devoit arriver à Jerufalem. Les trois difciples qui dormoient fe reveillerent tout d'un coup de leur fommeil, & furent furpris de cette gloire du Sauveur & de la prefence des deux Prophetes qui luy parloient. Saint Pierre eftant tranfporté de joye dit à J. C. Seigneur, il nous eft bon d'eftre en ce lieu: nous y ferons fi vous voulez trois tentes, une pour vous, une pour Moyfe, & une pour Elie. Mais lors qu'il parloit encore une nuée éclatante les enveloppa, & il en fortit une voix qui dit : C'est là mon Fils bien-aimé, écoutez-le. Les difciples tomberent auffi-toft par terre, & lors qu'ils eftoient faifis de crainte J. C. s'approcha d'eux & les toucha, en leur difant: Levez-vous & ne craignez rien. Ils fe leverent & ne virent plus que J. C. qui leur défendit en defcendant avec eux de la montagne de rien dire de ce qu'ils avoient veu. Cette transfiguration toute pleine de myfteres fut un des moyens dont J. C. fe fervit pour fortifier la foy de fes difciples, & pour les affurer plus fenfiblement qu'il eftoit Dieu. Il voulut par cette anticipation de fa gloire leur faire voir ce qu'ils feroient un jour eux-mefmes à la refurrection des morts, que malgré les travaux & les fouffrances de cette vie ils ne laifferoient pas de joüir de la gloire dont ils avoient esté témoins fur cette montagne. Cette veuë auffi les a rendus forts enfuite dans leurs plus grandes douleurs. Quand le S. Efprit eft furvenu en eux, il leur a rendu cette vifion plus utile qu'elle ne le parut à ce moment, & ils comprirent par & ils comprirent par fa lumiere que cette gloire ineffable de J. C. qu'ils avoient veuë de leurs propres yeux feroit communiquée à leur propre corps. Ainfi l'on peut dire que le deffein de J. C. dans cette Transfiguration n'eftoit pas feulement de rendre fes Apoftres forts au jour de fa Paffion, & de les faire fou-venir de fa gloire dans le temps de fon humiliation;

&

mais encore de les rendre forts eux-mefmes dans le temps de leurs fouffrances, & de les encourager dans leurs afflictions par la veuë de la gloire dont elles devoient eftre fuivies.

Enfant modelle de l'humilité. Matth. 18.

JESUS-CHRIST eftant descendu avec les trois Apôtres La même

de la montagne de Thabor, vint retrouver les autres Difciples qui eftoient environnez d'une grande foule de monde. Un homme dont le fils eftoit tourmenté du demon les eftoit venu prier de le guerir en l'absence de leur Maiftre. Mais quoy que J. C. leur cust donné pouvoir fur ces efprits, ils ne pûrent neanmoins chaffer celuy-là. Et aprés que J. C. l'eut fait, & qu'il eut rendu ce fils à fon pere, fes Difciples luy demanderent en particulier pourquoy ils ne l'avoient pu guerir euxmefmes. Il leur répondit que c'eftoit à caufe de leur peu de foy,& il ajoûta que s'ils avoient la foy,ils pourroient tranfporter les montagnes de leur place & les faire aller dans la mer. Il leur dit enfuite que cette forte de demons ne fe guerifloit que par la priere & par le jeûne. Et il leur apprit ainfi qu'ils fe trompoient s'ils prétendoient exercer une autorité abfolue fur les demons,& que pour bien user de leur pouvoir,il faloit se rabaiffer aux moyens ordinaires que Dieu avoit établis, comme eftoit la priere & le jeûne,pour chaffer les efprits impurs. J. C. alla enfuite à Capharnaum, où ceux qui levoient les impofts demanderent à S. Pierre fi fon Maiftre ne payoit point le tribut. Cet Apoftre leur répondit qu'il le payoit. Et eftant entrez au logis J.C.prévint S.Pierre & luy dit: De qui les Princes de la terre exigent-ils le tribut? Eft-ce de leurs enfans ou des étrangers? Mais pour ne les point fcandalifer, ajoûtat-il, allez à la mer, & ouvrez la bouche du premier poiffon que vous y prendrez, vous y trouverez une piece de monnoye que vous donnerez pour moy & pour vous. Le Sauveur a appris ainfi aux Chreftiens de

Τ

année 3

vivre dans la vie commune, fans troubler l'ordre que Dieu y a étably, & fans fe troubler eux-mefmes des évenemens du monde. Comme J.C.eftoit dans ce logis avec tous fes difciples, il leur demanda dequoy ils s'entretenoient lors qu'ils eftoient en chemin, parce qu'il fçavoit qu'ils avoient difputé qui étoit le premier d'entre eux. Et voulant ruiner de bonne heure dans leur efprit tous ces fentimens d'orgueil, & toutes ces penfées de préeminence, il leur dit: Que celuy qui voudroit eftre le premier de tous devinft le dernier de tous. Et pour leur donner encore une image plus fenfible de cette difpofition du coeur dans laquelle il vouloit qu'ils fuffent, il prit un petit enfant qu'il embrafla, & le mettant au milieu d'eux, il leur dit: Que s'ils ne travailloient à fe rendre femblables à ce petit enfant, ils n'entreroient point dans le royaume des cieux. Les SS. PP. ont efté frappez de cette fentence du Sauveur; & voyant combien cela eftoit difficile à l'orgueil humain, ils n'ont point eu d'autre efperance que dans la grace de celuy-là mefme qui leur faifoit ce commandement. Ils ont appris de-là combien il eftoit important d'étouffer tous ces defirs ambitieux de vouloir paroiftre plus que les autres, & ils ont reconnu que le foin du veritable Chreftien eftoit de fe cacher toûjours, & d'eftre bien-aise que tous les autres paroiffent.Un homme n'eft plus grand qu'un autre homme, qu'à proportion qu'il a plus de charité que luy, & tout le refte eft vain devant Dieu. Que fi on vouloit s'élever au-deffus des hommes, parce qu'on a plus de vertu qu'eux, on deviendroit par cet orgueil le dernier de tous, JESUS-CHRIST étouffe l'orgueil & il le retranche jusqu'à la racine, en reduisant ses Difciples à l'eftat d'un petit enfant. Et fi l'on veut juger fi l'on fera du nombre des bienheureux dans l'autre monde, on n'a qu'à voir fi l'on eft du nombre des enfans & des humbles en celuy-cy, & fi on travaille par la fimplicité, par l'humilité, par l'obeïffance & par les autres vertus, à eftre auffi petit dans l'ame que les enfans le font dans le corps.

Les dix Lepreux. Luc. 17.

La même

JESUS-CHRIST ESUS-CHRIST ayant pris occafion de la difpute de. fes Difciples touchant la primauté, de leur recom-née 3. mander l'humilité Chreftienne, & de leur donner du refpect pour les enfans & pour les foibles qu'il affura eftre tres-dangereux de feandalifer, il quitta la Galilée; & la fefte des Tabernacles s'approchant, fes parens & fes freres l'exhorterent à aller en Judée, d'où il s'eftoit retiré à caufe de la mort de S. Jean. Ils luy dirent qu'il n'avoit rien à craindre, & luy parlant comme à un homme qui affectoit de s'acquerir de l'eftime des hommes par fes grands miracles, ils témoignerent, comme dit l'Evangile, qu'ils ne croyoient point en luy. JESUS-CHRIST ne s'arrefte point à refuter leurs vaines imaginations. Il fe contenta de leur dire que leur temps eftoit toûjours preft, mais que le fien n'étoit pas encore venu. Que pour luy il n'iroit pas encore en Judée. Ses parens affifterent à la fefte avant luy. Et aprés qu'il eut demeuré quelques jours en Galilée il alla dans la Judée, non publiquement & avec éclat comme à fon ordinaire, mais en fe cachant. Lors qu'il paffoit par le milieu de la Samarie, il trouva à l'entrée d'un bourg dix Lepreux, qui fe tenant loin de luy par refpect, éleverent leurs voix & le prierent d'avoir pitié d'eux. JESUS-CHRIST les voyant leur dit qu'ils s'allaffent montrer aux Preftres afin d'obeïr ainfi aux ordonnances de la Loy. Il apprit ainfi à ceux qui croiroient en luy jufqu'où devoit aller leur condefcendance pour s'accommoder aux coûtumes & aux pratiques de l'Eglife, & quelle devoit eftre leur déference pour les puiffances qui y font établies. Mais il arriva que lors que ces dix hommes alloient fe montrer aux Preftres ils fe trouverent gueris de leur lepre. Ce que voyant un d'entre eux, il retourna auffi-toft fur fes pas glorifiant Dieu à haute voix d'une puerison fi

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