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Rachel & Lia. Genef. 29.

acob eftant affuré de la protection de Dieu par cet-Leěna te vifion mysterieuse, continua fon chemin fans. 24 rien craindre & vint en Haram, où ayant trouvé quelques pafteurs, il leur demanda s'ils connoffoient Laban, le petit fils de Nachor. Les bergers luy montrerent Rachel fa fille qui venoit avec les troupeanx pour les abreuver à un puits, dont on fermoit toûjours l'entrée par une groffe pierre. Dés que Jacob l'apperceut, il ofta cette pierre afin que Rachel pûst faire boire fes troupeaux, & il fe fit connoiftre à elle. Rachel en ayant auffi-toft donné avis à Laban fon pere, il courut pour l'embraffer & le fit venir chez luy. Ce fut alors que Jacob luy dit le fujet de fon voyage. Il luy découvrit l'animofité de fon frere, & la neceffité où il avoit efté de fuïr. Laban confentit de bon cœur qu'il demeuraft chez luy. Mais comme il ne pouvoit fouffrir qu'il le fervift gratuitement, Jacob luy dit qu'il le ferviroit durant sept ans pour époufer Rachel fa feconde fille. Ces fept ans s'eftant écoulez, & Jacob ne comptant rien fon tra- M.hts. vail, parce qu'il aimoit Rachel, il vit neanmoins J. C. fes efperances bien trompées. Car Laban ne pouvant Jacob fouffrir que fa feconde fille fuft mariée avant l'aînée, aus, envoya le foir Lia au lieu de Rachel, & fit que Jacob fans le fçavoir la prit pour fa femme. Jacob s'en plaignit le lendemain. Mais Laban pour l'appaifer le pria de laiffer paffer fept jours, pour la celebrité de ces premieres nopces, aprés lefquels il luy donna Rachel, à condition neanmoins qu'il ferviroit encore fépt années. Pendant ces fept années Jacob cut fix fils de Lia. Rachel eftant demeurée long-temps fterile, & en témoignant fa douleur à fon mary, Dieu enfin exauça fes prieres & elle conceut un fils

L'Anda

Avant,

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ayant 84

qui fut appellé Jofeph. Jacob aprés la naiffance de ce fils pria Laban de trouver bon qu'il s'en retournast chez fon pere. Il luy reprefenta qu'il avoit accompli les quatorze ans. Qu'il avoit gouverné fon bien avec toute forte d'équité. Qu'enfin il estoit temps qu'il travaillaft auffi pour luy-mefme, & qu'il penfaft à l'établissement de fa maison. Laban le conjura de demeurer encore avec luy, & ils s'accorderent enfemble de ce qu'il luy donneroit pour recompenfe des fes fervices. Ce qui l'obligea d'y demeurer encore fix ans. Les faints Peres en voyant la vie de Jacob, ont admiré la conduite de Dieu fur ce faint Patriarche qu'il laiffa dans une servitude de vingt années, quoy qu'il luy euft promis toute la terre de Chanaan, Ses enfans devoient eftre les Princes de tout un grand peuple, & leur pere eft luy-mefme dans l'affujettiffement & dans les travaux. Dieu, difent les Saints, vouloit nous apprendre par cet exemple que la gloire des Princes & des Pafteurs de l'Eglife eft de travailler, & de penfer plus à fatisfaire les autres qu'à fe fatisfaire eux-mefmes. Leur joye eft la joye de leur peuple, & ils luy facrifient de bon cœur leur peine & leur vie, parce que toute leur ambition doit eftre de pouvoir dire un jour à Dieu ces belles paroles que Jacob dit à Laban: J'ay fouffert le froid & le chaud pour conduire voftre troupeau. Je ne me fuis donné du repos ny jour ny nuit, & le fommeil a fuy de mes yeux. Je n'ay perdu aucune de vos brebis: le voleur n'en a point dérobé, la beste farouche n'en a point dévoré; il n'y en a point eu de fterile, & pour recompenfe des bons fervices. que j'ay toûjours tâché de rendre aux hommes, je n'en ay receu que de l'ingratitude & des mauvais traitemeus.

La

Retour de Jacob. Genef. 31.

L'An du

Avant

1739

ayant

a benediction que Dieu répandit fur Jacob & fur, tout ce qui luy appartenoit, ayant excité l'envieм. 2264 de Laban; ce faint Patriarche vit qu'il eftoit de la pru-3. c. dence de quitter la Mefopotamie, par la mefme raifon job qu'il avoit quitté autrefois la terre de Chanaan. Lors 4. aus. qu'il eftoit dans ces penfées fans qu'il ofaft les executer, parce qu'il craignoit de rien faire par fon efprit propre; Dieu luy commanda luy-mefme de retourner dans la terre de fa naiffance, & luy promit de le défendre d'Efau fon frere. Jacob penfa auffi-toft à accomplir cet ordre fort fecrettement, & à fortir de la Mefopotamie comme il y eftoit venu, c'est à dire en fugitif. Il appella fes deux femmes Rachel & Lia. Il leur découvrit fon deffein qu'elles approuverent toutes deux, & elles confentirent de le fuivre. Lors donc que Laban eftoit abfent, Jacob partit fans luy dire adieu, & emmena avec luy tout ce qui luy appartenoit. Laban fut averti d'un départ fi foudain, & apprenant qu'on luy avoit en mefme temps emporté fes idoles, il pourfuivit Jacob durant fept jours avec une étrange colere, & l'attrapa auprés de la montagne de Galaad. Comme il eftoit preft de le joindre Dieu luy apparut durant la nuit, & luy défendit de faire aucun mal à Jacob. Dés qu'il l'apperceut de loin, il fe plaignit en criant, de ce qu'il emmenoit ainfi fes filles comme des captives qu'il auroit prifes des ennemis. Il luy dit qu'il avoit eu tort de luy celer fon deffein: Qu'il l'auroit accompagné luy-mefme avec honneur, & qu'il auroit en la confolation de dire les derniers adieux à fes filles: Qu'il ne defapprouvoit pas qu'il voulust retourner à la terre de fes Dieux, mais qu'il ne devoit pas luy avoir volé les fiens. Jacob l'interrompit à cette parole; & aprés s'eftre excufé du fecret de fon voyage, il nia ce vol de fes Dieux dont il l'accufoit, & confentit mefme qu'il fift mourir celuy qu'il trouveroit les avoir pris: ce qu'il difoit hardi

ment, parce qu'il ne fçavoit pas que Rachel euft emporté ces idoles. Laban les ayant donc cherchez avec un foin tres-exact; lors qu'il entra dans la tente de Rachel pour les chercher, elle les cacha promtement fous la litiere des chameaux; & s'eftant affife deffus, elle pria Laban de l'excufer de ce qu'elle ne fe levoit pas pour le falüer, parce qu'elle fe trouvoit incommodée. Ainfi la recherche de Laban ayant efté inutile, Jacob commença à fe plaindre à fon tour du traitement fi injufte qu'il luy faifoit. Mais enfin leurs efprits s'eftant adoucis, ils fe reconcilierent l'un avec l'autre, & fe feparerent en s'entrejurant une amitié eternelle. Saint Ambroife admire icy Jacob comme un modelle parfait de la juftice & de la fageffe qu'il faut garder en vivant avec le monde. Il avoit foin de n'y poffeder que ce qu'il pouvoit emporter avec luy, afin de ne dépendre de perfonne. Il ne perd rien de ce qui luy appartenoit, & il n'a rien de ce qui appartenoit à un autre. Il s'eftoit enrichi non feulement fans faire tort aux autres, mais mefme en procurant leurs avantages particuliers. Laban qui le traitoit fi fervilement, qui ne luy vouloit point de bien, & qui ne cherchoit qu'à luy nuire, ne peut le faire neanmoins. Il ne peut empefcher qu'il ne fe retire d'auprés de luy avec de grandes richeffes: & toute fa mauvaise humeur cede lors qu'il agit avec un homme qui joignoit par tout la juftice avec la fageffe, & qui fe conduifoit en toutes chofes par l'Efprit de Dieu. Heureux, dit ce faint Pere, qui peut comme Jacob dire au demon & au monde: Voyez s'il y a rien dans moy qui vous appartienne, & reprenez-le; Et bien heureufe Rachel qui fuit d'une maifon idolatre & foule aux pieds les idoles de fon pere. Elle apprend aux filles chreftiennes de ne pas fuivre la paffion de leurs peres, qui fouvent les veulent facrifier à l'idole de la vanité & du fiecle; mais qu'elles peuvent alors fe dérober de leur maison pour chercher une terre fainte, de peur de fe rendre indignes de Dieu en aimant plus leurs peres que Dieu.

Reconciliation d'Efau avec Jacob. Genef. 33.

Jacob

année.

Jacob eftant délivré des mains de Laban, ne penfa La même plus qu'à fe fauver de celles d'Efau fon frere. Il commença par luy envoyer de fes gens pour luy donner avis qu'il retournoit de Mefopotamie en Chanaan, & pour le prier d'agréer fon retour. Mais fes gens revenant & luy ayant rapporté qu'Efaü s'eftoit auffi-toft mis en chemin avec quatre cens hommes, il fut faifi d'une extrême frayeur, qui luy fit jetter de grands cris vers Dieu, pour le prier de le délivrer de la colere d'Efau fon frere. Aprés avoir ainfi mis fon principal appuy en Dieu; il ufa enfuite de toute fa prudence naturelle, & crut qu'il devoit penser à fléchir fon frere en quelque maniere que ce fuft. Les prefens luy parurent eftre pour cela la meilleure voye. C'eft pourquoy feparant une partie de fes troupeaux, il les fit marcher devant luy avec des diftances égales, afin qu'Efau les rencontrant les uns aprés les autres, fon efprit s'adoucift peu à peu par la veuë de tant de dons, & par la foûmiffion de ceux qui les luy offroient. Jacob ayant donné ces ordres lors qu'il devoit les executer le jour fuivant, il eut fur la fin de la nuit une vifion d'un homme qui luita contre luy jufqu'an matin, & qui luy touchant le nerf de la cuiffe la fit auffi-toft fecher. Mais Jacob prenant de nouvelles forces d'une fi heureuse bleffure, dit à celuy qui l'avoit bleffé & qui vouloit fe retirer, qu'il ne le laifferoit point aller qu'auparavant il ne l'euft beni. L'Ange luy demanda fon nom, & luy donna celuy d'Ifraël, qui depuis eft devenu fi fameux. Il l'affura que s'il avoit efté fort en combattant contre Dieu mefme, il ne devoit point craindre les hommes, & que fon frere ne luy feroit aucun mal. Auffitost aprés Jacob vit de loin Efau qui venoit à luy ac

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