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A Stuérus étant allé dîner chez la Reine Elther avec La mème

Aman, preffa Efthèr de lui déclarer ce qu'elle defi- aunée 3495

.

roit de lui, Mais Efthèr changea auffi-tôt la joies d'un feftin dans la douleur que la vue des maux à venir lui avoit rendu continuelle; & prenant un vifage & un lan gage de fuppliante, elle ne demanda au Roi pour tou te grace que fa vie, & la vie de tout fon peuple. Elle lui déclara la malignité d'Aman, & par quelles impo ftures il avoit furpris fa facilité, & comme abufant infolemment du nom & de l'autorité du Roi, il avoit profcrit tous les Juifs. Ce Prince qui avoit naturellement de la bonté & de la juftice, fut furpris quand on lui, repréfenta jufqu'où fa crédulité & la cruauté de fon Mi niftre avoit pu aller: & le regret qu'il en eut, fit qu'il quitta le feftin, & fe retira dans un petit bois qui étoit proche. Pendant ce tems Aman voyant l'extrême péril qui le menaçoit, fe jeta fur le lit de la Réine, & la pria de le fecourir. Le Roi rentra dans la chambre, & le vit en cet état: & entrant en une furieufe colèré, comme fi devant lui-même il vouloit faire violence à Efthèr, il ordonna fur-l'heure qu'on le fit mourir. Mais comme la fageffe de Dieu confondant la vanité des hommes garde

tou

toujours une grande proportion entre les crimes & les fuplices, un des Officiers qui étoient préfens, dit au Roi, qu'Aman avoit préparé une potence haute de cine quante coudées pour y pendre Mardochée. Le Roi commanda auffi-tôt qu'on l'y attachât lui-même. Quoique l'on eût fi fort commis l'autorité de ce Prince contre les Juifs, dit faint Ambroife, il ne tint point néanmoins à défhonneur de reconnoître publiquement qu'an Ministre ambitieux l'avoit trompé; & au-lieu de pouffer jufqu'aubout une violence, parce qu'il s'y étoit déja engagé, il la fit ceffer au contraire auffi - tôt qu'il en connut l'injustice. Il tourna fa jufte indignation contre ceux qui abufoient fi cruellement de fa puiffance, & qui ne fe fervoient de l'accès qu'il leur donnoit auprès de fa perfonne, que pour perdre e comme leurs ennemis ceux que le feul zêle de

de Dieu retenoit t dans leur devoir, & ne leur per

it pas de rendre aux hommes un respect qui n'est

dù qu'à Dieu. Le Roi par une déclaration toute contraire à la premiere, témoigna publiquement l'eftime qu'il fe foit des Juifs, qu'on lui avoit repréfentés comme des gens rebelles & factieux; & la paix revint en un moment dans tout l'état par la mort d'un feul homme qui y avoit excité un fi grand trouble. Dieu fit voir clairement dans cette hiftoire, qu'il tient dans fa main le cœur des Rois; & il leur donne une admirable inftruction par ce livre divin, afin que fe fouvenant qu'ils font établis du Clel pour régner, ils tâchent de porter eux-mêmes le poids de leur couronne, & de voir tout de leurs propres yeux; de peur que s'ils abandonnent toute leur autorité entre les mains de ceux qu'ils honorent de leur confiance, it ne s'en trouve qui en abufent, comme Aman, pour fa tisfaire leurs paffions & leur intérêts aux dépens de la juftice & de la réputation du Prince.

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L

ftoire. Néan

E faint homme Job qui eft devenu fi fameux par L'on ne fait fon humble patience, avoit durant toute fa vie pas affure. allié deux chofes bien- difficiles; une grande vertu avec tems s'eft pafment en quel de grandes richeffes. Il étoit, dit l'Ecriture, jufte, fim. fé cette hi ple, &'craignant Dieu; & il ne fe contentoit pas de fe moins il Y a retirer du mal lui-même, mais fe fouvenant qu'il étoit pè apparence re, il ne fe laffoit point d'inftruire auffi fes enfans dans durant que que ç'a été la crainte de Dieu, & lui offroit fouvent des facrifices les Ifraélites pour les fautes fecrètes qu'ils auroient pu commettre con- le defert. étoient dans tre lui. Le Démon ne put foufrir une fi grande vertu fans lui donner quelque atteinte. Il ofa porter fes calomnies jufqu'à Dieu même; & ne trouvant rien dans la vie, de Job, qu'il put blâmer,, il accufa fes intentions cachées, foutenant devant Dieu, qu'il ne le fervoit qu'à caufe des avantages temporels qu'il en recevoit, Dieu pour confondre ce calomniateur, & pour le convaincre davantage de fon impofture, lui donna la puiffance de lui râvir tout fon bien, Le Démon ufa de ce pouvoir r avec t toute fa malignité; & pour mieux accabler ce faint homme par un grand nombre de maux, il fit en même tems piller fes troupeaux par des voleurs, périr fes brebis par le feu du ciel, emmener les chameaux par les ennemis, & mourir

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tous fes enfans fous les ruines d'une maifon qu'il fit tom-
ber pendant qu'ils étoient à table. Job reçut en même tems
ces triftes nouvelles, fans que fa vertu en fùt ébranlée.
Il fe profterna en, terre, il bénit Dieu; & il dit ces pa-
roles qui depuis font devenues fi célèbres: Dieu me l'à
donné, Dieu me l'a ôté: Ce qui a plu au Seigneur, a
L'innocence que
été fait Que fon faint Nom foit béni.
ce faint homme conferva en cette rencontre qui ne fer-
vit qu'à rendre fa vertu plus pure, plus ferme & plus écla-
tante, défefpéra cet efprit de malice, qui fe voyoit con-
fus par celui qu'il avoit voulu confondre. C'est pourquoi
il demanda encore à Dieu le pouvoir de le fraper dans
fa chair, parce qu'il ne peut rien contre les Saints qu'au-
Dieu lui accorda fa deman-.
tant que Dieu le lui permet.
de pour confondre encore plus fa malignité, & pour faire
voir qu'il n'y avoit rien que de très-fincère dans la ver-
Le Démon alors frapa Job d'un ul-
tu de fon ferviteur.

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cère épouvantable qni lui couvroit tout le corps.
réduit à s'affeoir fur un fumier, &
d'un pot de terre la pouriture qui fortoit de fes plaies,
Il ne lui reftoit alors de
& les vers qui s'y formoient.
tout ce qu'il poffédoit autrefois dans le monde, que fa
femme feule. que le Démon lui avoit laiffée pour être,
non la confolatrice, mais la tentatrice de fon mari, &
Car cette femme ju-
pour le porter dans l'impatience

ce faint homme

geant par ces malheurs, que la piété de
étoit vaine, tâcha de le jeter dans des paroles de blaf-
phême & de défespoir. Mais Job réfifta aux traits de fa
langue envénimée, & fe contenta pour la faire taire de
lui dire cette parole: Vous avez parlé comme une femme
infenfée: puifque nous avons reçu les biens de la main
de Dieu, pourquoi n'en recevrions nous pas auffi les
maux? Il vit d'un œil éclairé ce que l'on doit craindre
Et faint
des perfonnés qui nous font les plus unies.
dit que
Auguftin admirant fa fermeté en cette rencontre,
Job n'ayant point fuccombé à cette Eve, eft devenu in-
comparablement plus glorieux fur fon fumier, qu'Adam
me le fut autrefois dans toutes les délices du Paradis.

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Job

Ob étant réduit dans l'état qui a été marqué aupara vant, paroîffoit être dans le comble de l'affliction, s'il he lui en fût encore furvenu une nouvelle, qui bleffoit autant fon cœur que fes autres maux lui étoient fenfibles dans le corps. Trois de fes amis à qui l'Ecriture donne le nom de Rois, vinrent le vifiter pour lui témoigner la part qu'ils prenoient à fon malheur Mais aulieu de recevoir d'eux quelque confolation folide, il eut befois de fe défendre contre la fauffeté de leurs raifons, & l'injuftice de leurs pensées. Tout ce qui reftoit à ce bienheureux homme dans une fi rude épreuve, étoit le té moignage de fa confcience, & l'innocence de fa vie paffée. Et c'est ce que ces amis indifcrets lui vouloient ôter, en foutenant qu'il faloit qu'il eût commis de grands crimes, puifque Dieu le châtioit fi févèrement. Ils jugeoient de la conduite de Dien fur ce faint homme avec un fens tout humain; & ils ne mêloient de graves difcours dans ce qu'ils difoient contre lui, que pour donner plus d'autorité à leurs médifances. Ce faint homme foufrit ce dernier mal avec plus de peine qu'il n'avoit foufert tous les autres; & quelque effort qu'il fit pour les faire entrer dans des fentimens de raifon & d'équité, ils montrèrent

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