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Après toutes les prédications que JESUS-CHRIST fit au

peuple depuis fon entrée à Jérufalem, comme il ne reftoit plus que deux jours jufqu'à la fête de Pâque, il ordonna à fes difciples de préparer toutes chofes, Lorfque tout étoit difpofe, & que Judas avoit déja arrêté avec les Juifs de leur livrer fon Maître, le Sauveur entra dans une grande fale bien ornée, qu'il avoit marquée à fes Apôtres pour y y faire la Cène enfemble; & il leur déclara d'abord qu'il avoit toujours eu un grand defir de célébrer cette Pâque avec eux, comme s'il n'eut compté pour rien tout ce qu'il avoit fait jufques-là pour fes difciples, & vouJant porter jufqu'au bout les marques & les effets de fon amour. Après qu'il eut mangé l'Agneau avec eux, felon l'ordonnance de la loi, avant que d'établir fon Sacrement divin, il fe rabaiffa jufqu'aux piés de fes difciples, & prenant de l'eau dans un baffin pour les laver, il les effuya d'un linge dont il s'étoit ceint, finiffant cette action d'une humilité fi prodigieufe par ces paroles qui regar. dent tout le monde : Je vous ai donné l'exemple, afin que vous faffiez tous les uns aux autres ce que je vous ai fait moi-même. Il reprit enfuite fes habits, & s'étant remis table, il prit du pain, le bénit & le rompit, & le donna

La même 3 née 33.

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à fes difciples, en leur difant: CECI EST MON CORPS.. Il fe donna à eux de fes propres mains, & il ne refufa pas cette grace à Judas quoiqu'il connût fa perfidie, parce qu'il ne ne vouloit pas le découvrir aux autres, afin que la douceur dont il ufoit envèrs lui, fît quelque impreffion fur la dureté de fon cœur. Mais il fut le premier exemple qui nous montra que ce Sacrement adora. ble que le Fils de Dieu inftituoit alors pour la confolation & le falut des fidèles, ne feroit que la condamnation de ceux qui le recevroient indignement, & que le démon entreroit dans leurs ames lorfque JESUS - CHRIST entreroit dans leurs corps. Ce difciple doublement coupable du Corps & du Sang du Fils de Dieu, témoigna fon endurciffement jufqu'au bout; & lorfque chacun des difciples épouvantés demandoit à JESUS-CHRIST s'il le trahiroit, il eut la Hardieffe de demander auffi lui-même. à JESUS CHRIST comme les autres fi ce feroit lui qui feroit le traître. Et au même moment il fortit pour aller faire cette action déteftable où fon avarice l'avoit peuà-peu conduit. La perfidie de ce difciple a fait admirer aux faints Pères la bonté du Sauveur qui ne laiffe pas de fe donner à lui comme aux autres , & qui foufre qu'il reçoive fon facré Corps, avec la même patience qu'il foufre un peu après fon baifer parricide. L'Eglife dans tous les fiècles a toujours gémi, en fachant que fon Epoux célefte foufroit encore tous les jours le même outrage à l'Autel dans fon Sacrement divin, qu'il foufrit alors. Elle a témoigné fa douleur profonde de fe voir obligée de donner la chair fi pure du Sauveur à des ames impures, elle a admiré l'humilité de JESUS-CHRIST, qui ne fort ni du ciel ni de fon autel pour se vanger de ceux qui l'outragent. Il veut être encore aujourd'hui fur nos Autels comme le modèle de notre patience; & fi nous lui fommes fidèles, nous devons travailler en le recevant à nous rendre les imitateurs de fon ineffable humilité, & pleurer le malheur de ceux qui le déshonorent par tant de communions facriléges.

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JÉSUS

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A

Frès que Judas fut forti d'avec JESUS-CHRIST pour exécuter le deffein qu'il avoit concerté avec les Juifs, le Sauveur fit aux Apôtres un admirable difcours, & nous apprit en joignant la parole avec fon corps, qu'elle eft aufi la nouriture de nos ames, & que nous les devons allier ensemble comme JESUS-CHRIST l'a fait lui-même. Il dit en même tems à faint Pierre que le démon avoit demandé de le tenter, mais qu'il avoit prié fon Père pour lui. Cet Apôtre au-lieu de s'humilier de ces paroles & de cette promeffe du Fils de Dieu, s'en éleva comme il parut auffi-tôt après. Car JESUS-CHRIST lui prédifant formellement qu'il le renonceroit par trois fois avant que le coq chantât, il lui répondit hardiment qu'il ne le feroit jamais, & que bien-loin de le renoncer, il étoit prêt d'aller avec lui en prifon & même à la mort. Ainfi n'ayant pu être humilié par la terrible prédiction de fa chute, il falut qu'il le fût bien-tôt après par la chûte même. Après donc que JESUS-CHRIST eut dit à fes difciples ces vérités admirables. contenues dans ce dernier Sermon, il leur commanda de prendre avec eux des épées, & il paffa ainfi le torrent de Cédron pour aller felon fa coutume fur la montagne des Olives, Ses Difciples l'y fuivirent &lorfqu'ils furent en

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La même année 33.

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un lieu nommé Gethfémani, il les y fit demeurer, afin qu'il allât feul dans un jardin qui étoit proche pour y prier, comme il fefoit fort-souvent, & qui pour ce sujet étoit connu de Judas. Il prit feulement avec lui Pierre, Jâques & Jean qui lui étoient les plus chèrs entre fes difciples, & qui ne quittoient guère le Sauveur. Etant avec eux, il leur dit: Qu'il étoit dans une trifteffe mortelle, & il les exhorta à veiller avec lui pendant qu'il prieroit. Il s'éloigna d'eux enfuite d'un jet de pierre, & se mettant à genoux, il pria fon Père de ne lui point faire boire ce calice; que néanmoins fa volonté fe fît & non pas la fienne. Il parut en même tems un Ange pour le fortifier; & JESUS-CHRIST entrant dans l'agonie tomba le vifage en terre, & il fortit une fueur de fang qui couloit de tout fon corps. Cet étrange affoîbliffement du Fils de Dieu a été l'admiration des faints Pèqui comparant JESUS CHRIST en cet état avec tant de Saints qui ont été fi gaiment à la mort ont reconnu combien cette trifteffe, cette crainte & cette foîblesse étoit miftérieufe, puisqu'ainfi qu'ils le remarquent très-fagement, les malades n'ont pas pu être plus forts que leur médecin ni les membres que leur chef. Mais JESUS-CHRIST a voulu prendre fur lui tous les effets de l'infirmité humaine, pour la confolation des foîbles d'entre les Chrétiens, lorfqu'ils fe trouveroient dans cette difpofition aux approches des maux & de la mort. Il nous a donné lieu de juger quels effets doit produire la gloire de sa résurrection & la vertu de fa grace en nous, puifque fa foibleffe même eft notre force, fon trouble notre affurance, & fa trifteffe notre confolation & notre joie. La prière qu'il fait à fon Père par trois fois d'éloigner de lui ce calice, & qu'il conclut toujours par une humble foumiffion à fa volonté, eft le modèle de toutes nos prières. Après avoir témoigné dans toute fa vie une obéiffance parfaite pour tous les ordres de fon Père, il femble qu'il la renouvèle à fa mort, & qu'il ne se réserve pour le tems de fa passion que la seule obéissance, Il nous a appris ainfi, que c'est particulièrement en ce point que nous devons être fermes & inébranlables, & que dans les premières attaques des afflictions, ou dans les premières approches de la mort,nous devons travailler à vaincre toutes nos répugnances, pour nous abandonner à Dieu, & pour le prier que fa volonté fe faffe en nous, & non pas la nôtre.

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née 33.

ESUS-CHRIST fe trouvant dans la trifteffe & dans l'ago- La même an nie au jardin., nous donna un grand exemple d'humilité, en venant chercher dans fes difciplès quelque confolation

Mais il ne les trou

peines; parce qu'ils
Il les vint réveiller

& quelque foulagement à fes maux,
va guère difpofés à prendre part à les
étoient abatus: d'un profond fommeil,
par trois fois,, em leur difant ces paroles fi faintes: Veil-
lez & priez, parce que l'efprit eft promt & la chair eft
foldie
Mais lorfqu'il ceffa de leur parler la troifième
fois, Judas parut avec une grande troupe de gens armés
qu'il avoit eus des Juifs & des Pharifiens. Il leur avoit
donné pour fignal, que celui qu'il baiferoit, étoit celui qu'il
faloit prendre; qu'ils fe faififfent auffi-tôt de lui, & qu'ils
l'amenaffent avec fageffe, de peur qu'il ne fe fauyat d'entre
leurs mains. Il vint donc fans rien craindre trouver le
Sauveur du monde, & il le baifa, JESUS-CHRIST le fou
frit avec fa douceur ordinaire; pour nous apprendre à fup-
porter ceux qui lui reffemblent, & à ne nous point ai-
grir des mauvais traitemens des amis mêmes & des dome-
ftiques; il lui dit néanmoins en un mot: Mon ami
qu'êtes-vous venu faire? Trahiffez-vous le Fils de l'hom-
me par un baifer? Mais c'étoit plutôt pour tâcher de le

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