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Dieu; & lors qu'il fe vit à la tefte d'une armée fi nombreuse, bien loin d'en eftre plus vain, il en parut au contraire plus humble, & la défiance qu'il avoit de luy-mefme fembla aller jufqu'à l'excés. Car il ne fe contenta pas de ce premier miracle que Dieu avoit déja fait en fa faveur, ni de ce courage qu'il luy avoit infpiré. Il fufpendit encore tous les def feins, jufqu'à ce que Dieu luy cuft donné de nouvelles marques de fa volonté, & du choix qu'il faifoit de luy pour la conduite de fon peuple. En quoy comme remarque S. Ambroife, il n'agiffoit pas tant pour fon befoin particulier, que pour noftre inftruction, & pour nous apprendre à nous mefmes, à ne nous pas trop facilement affurer, que Dieu nous ait appellez à des emplois plus faints, que n'eftoient ceux où Gedeon fe vit appellé alors. C'est pourquoy il conjura Dieu de l'affurer encore une fois qu'il avoit refolu de fe fervir de luy pour delivrer fon peuple de fes ennemis par ce miracle qu'il luy marqua. Il le pria d'agréer qu'il mift dans un champ une toifon de breby, & il luy dit que fi la rofée tomboit fur la toifon, pendant que tout le champ demeureroit fec, il reconnoiftroit alors que fauveroit le peuple. Ce miracle arriva comme il l'avoit fouhaité, mais fon humble crainte n'eftant pas encore affez diffipée; il pria Dieu de faire un fecond miracle contraire au premier. Il le conjura que la rofée trempast toute la terre, & qu'il n'y euft que la toifon feule qui demeuraft feche. Ce que Dieu fit encore, pour l'affurer pleinement qu'il l'avoit choifi pour eftre le liberateur de fon peuple. Ces deux miracles, felon les faints Peres, marquoient la conduite que Dieu devoit tenir à l'égard des Juifs, & enfuite à l'égard de l'Eglife des Gentils. Ses graces autrefois eftoient toutes renfermées dans la Judée feule, qui recevoit en quelque forte du ciel une rofée celefte, pendant que le refte des peuples du monde eftoit dans une fechereffe fterile, & brûlé par les ardeurs du peché, Mais par un miracle contraire, l'Eglife enfuite répandue par toute la terre, a receu

Dieu

avcc

!

avec abondance la pluye dont Dieu l'a arrofée, pen-
dant que la Judée à son tour, eft demeurée dans la
fechereffe, & que l'ingratitude qu'elle a témoignée
aux dons de Dieu, qui ne fervoient qu'à l'élever au
lieu de la rendre plus humble, l'a renduë indigne
d'avoir part à la mifericorde de JESUS-CHRIST.
Mais l'un & l'autre miracle nous apprend, que la
grace de Dieu est comme une rofée celefte, fans la-
quelle nous demeurons au dedans de l'ame dans le
mefme estat l'eft une terre feche brûlée les
que
par
ardeurs du foleil, & condamnée à une fterilité
çternelle.

Soldats de Gedeon. Juges 7.

V

La mé

Me an

née

2759.

Eux miracles fi fenfibles ayant confirmé en mes

Dmx temps à Gedeon la vocation à la conduite

de tout le peuple, & la promeffe de la victoire fur les ennemis, il ne put plus refufer d'obeïr aux ordres de

Dieu, & de luy témoigner autant de promtitude à executer fes deffeins, qu'il avoit témoigné de retenuë à les entreprendre. Il affembla donc en peu de temps une prodigieufe quantité de peuple, & fe campa devant le camp des Madianites. Mais Dieu voyant ce grand nombre de Juifs affemblez, & prevoyant que ce peuple ingrat & prefomptueux attribueroit à la multitude de les troupes une victoire dont il ne feroit redevable qu'à fa feule protection; il déclara à Gedeon que fi tout ce peuple marchoit en bataille, il ne remporteroit point la victoire, & qu'il ne vouloit pas qu'Ifraël pûft dire que c'eftoit par fa propre force qu'il avoit défait les Madianites. Gedeon fit donc publier d'abord dans tout le camp, que tous ceux qui feroient timides, & que l'approche des ennemis ou l'appareil du combat pourroit effrayer, fe retiraffent du camp & s'en retournaffent chez eux. Vingt-deux mille hommes furent ravis de cette propofition, & fe feparerent des autres, dont il ne refta plus que dix mille. Mais ce nombre eftant encore trop grand pour le deffein de Dieu, il commanda à Gedeon de les mener tous au Jourdain, où il luy promit de luy montrer ceux dont il devoit fe fervir. Lors qu'ils furent venus au fleuve, Dieu dit à Gedeon qu'il prift garde à ceux qui fans s'arrefter prendroient vifte & feulement en paffant de l'eau du fleuve dans le creux de leur main, pour appaifer un peu leur foif, ou aux autres qui s'agenoüilleroient afin de boire plus à leur aife. Il n'y en eut que trois cens de ces premiers; & Dieu dit à Gedeon que c'eftoit ces trois cens hommes qu'il devoit mener contre l'ennemy, parce qu'avec eux il remporteroit la victoire. Gedeon s'appuya fur la parole de Dieu, duquel il attendoit tout. Il renvoya le refte du peuple, & ne retint avec luy que ce peu de monde qu'il mena hardiment contre les Madianites. Dieu voulut difcerner alors ceux qui à l'avenir feroient propres à fon fervice & dignes de combattre fes ennemis, d'avec ceux qui n'entreroient pas comme il le defire dans cette milice fainte. Il nous fait voir icy combien le

nom

La mef

me année.

nombre de ses vrais foldats eft petit, puis que de trente-deux mille hommes il en rejette d'abord vingt-deux mille, & que des dix mille qui reftoient, il n'en retient que trois cens. La marque de leur élection eft qu'ils ne plient point le genou en prenant de l'eau du fleuve, & qu'ils ne donnent que comme en paffant ce foulagement à leur foif. Dieu veut que. fes foldats demeurent fermes & élevez vers le ciel, & qu'ils ne fe courbent vers la terre que le moins qu'il leur eft poffible. Comme eftant hommes ils font neceffairement obligez d'ufer de ce monde, il faut qu'ils en ufent comme s'ils n'en ufoient pas, felon la parole de faint Paul, & qu'ils fatisfaffent aux befoins les plus inévitables de cette vie, qui s'écoulé comme un fleuve, fans y avoir aucune attache, & fans retarder par ces actions paffageres leur courfe vers le ciel où ils habitent déja de coeur. Ces perfonnes font toûjours en petit nombre dans l'Eglife; mais c'eft neanmoins ce petit nombre qui en eft toute la force comme Dieu le montre icy, & qui combat pour elle contre les ennemis qui l'attaquent.

Défaite des Madianites. Juges 7.

Ant d'affurances de la victoire pouvoient fuffire

TâGedeon, s'il n'cult plû à Dieu de luy en don

ner une derniere preuve par la propre bouche de fes 2759. ennemis. Il luy commanda d'aller luy feul durant la nuit dans leur camp, ou s'il craignoit d'y aller feul, de s'y faire accompagner de fon fils. Il luy promit que lors qu'il y feroit, il entendroit de ses ennemis mefmes quel feroit l'evenement du combat. Gedeon fit ce que Dieu luy avoit ordonné. Il alla de nuit dans le camp des Madianites, où il entendit un foldat qui rapportoit à fon compagnon ce fonge qu'il avoit eu. Je croyois voir, luy difoit-il, comme un pain cuit fous la cendre qui roulant dans le camp, & eftant venu fondre contre une tente, l'a renverfée, & l'a brilée contre terre. L'autre luy répondit auffi-toft,

que

que ce fonge marquoit visiblement l'épée de Gedeon, aqui Dieu avoit livré les Madianites. Ce que Gedeon ayant ouy, il s'en retourna auffi-test avec l'affurance que Dieu luy avoit promife, & il alla retrouver les fiens, qu'il remplit de joye & de courage par le recit qu'il, venoit d'entendre. Il partagea enfuite fes trois cens hommes en trois bandes, qu'il arma d'une maniere auffi nouvelle, qu'elle eftoit mysterieufe. Il voulut qu'ils priffent chacun une trompette dans une main, & dans l'autre un vafe vuide où il y euft une lampe, & que lors qu'ils l'entendroient fonner de la trompette, ils fiffent tous auffi le femblable: Qu'ils joigniffent à ce bruit des trompettes, des acclamations, en difant à haute voix: Vive le Seigneur & Gedeon; & qu'ils brifaffent l'un contre l'autre les vafes où eftoient leurs lampes ardentes. Auffi-toft que Gedeon leur eut donné le fignal dont ils ettoient convenus; ils firent retentir le fon de leurs trompettes dans tout le camp des Madianites qu'ils environnoient. En mefme temps ils briferent ces vales de

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