puissance de Dieu qu'ils avoient esté frappez de tant de playes. Dieu suivit en quelque forte la foiblesse de ces personnes, & fit que ces animaux furmontant la tendresse naturelle qu'ils avoient pour leurs petits, traînerent l'Arche sans s'arrester. Ils la porterent droit vers la terre des Juifs, & devinrent ainsi une admirable figure de la maniere dont on doit aller à Dieu, en s'élevant au-dessus de toutes les affections de la terre. Les Grands d'entre les Philiftins voulurent eftre témoins de cette merveille, & ils virent avec estonnement que l'Arche s'arresta en Bethsamez, qui estoit la premiere ville des Juifs. Le peuple de cette ville fut dans une extrême joye en voyant l'Arche, dont la captivité tenoit tout Ifraël dans le deüil. Mais cette joye fut bien-tost changée en larmes, lors qu'ils virent que ce facré dépost épargnoit aussi peu les Juifs mesmes, qu'il avoit fait les Philiftins. Dieu punit les regards trop curieux des Bethsamites, & frappa d'entre eux cinquante mille personnes, parce dit l'Ecriture, qu'ils avoient veu l'Arche du Seigneur. La frayeur dont ils furent faifis, & la peur qu'ils avoient de mourir tous, leur fit dire en tremblant: Quel est ce Dieu, & quelle est sa sainteté, ou qui pourra subsister devant sa face? Ils envoyerent donc prier ceux de Cariathiarim de venir prendre l'Arché que les Philistins leur avoient renvoyée. Ils y vinrent & remenerent. l'Arche en Gabao, & la mirent dans la maison d'Abinadab, où estant dans le lieu que Dieu s'estoit choisi pour sa demeure, non seulement elle ne frappa point ce païs des playes dont elle avoit frappé tous les Philiftins, & enfuite les Bethsamites, mais elle le combla mefme de toutes fortes de benedictions; faisant voir sensiblement que celuy dont elle estoit la figure ne demande qu'à répandre ses graces fur les hommes quand on n'y met point d'obstacles; mais que lors qu'on irrité sa justice, il sçait bien faire éclater la grandeur de sa puissance dans le chastiment de ceux qui méprisent sa bonté. Les Bethsamites sembloient honorer l'Arche en se réjoüissant de la recevoir au milieu d'eux, mais leur joye estoit fuperbe, parce qu'ils mettoient leur gloire à posseder ce dépoft facré, fans se mettre en peine d'obeir à la loy de Dieu qui y rendoit ses oracles. Ainfi plusieurs, dit saint Gregoire Pape, s'approchent du corps du Fils de Dieu avec une confiance pleine de hardiesse, qui periffent dans fon Sanctuaire; parce que ne travaillant point à rendre leur ame pure pour se pouvoir nourrir de l'Agneausans tache, ils trouvent la mort dans la source de la vie. Défaite des Philistins. 1. Rois 7. La mê ne an née. 'Estat des choses estoit tel dans 2888. Samuel en honneur, que lors qu'il veut regarder favorablement son peuple, il commence par luy donner de bons Pasteurs. Ce faint Prophete se sentant animé de l'Esprit de Dieu, prescha dans tout Ifraël, re representa à ce peuple leurs pechez, & leur promit que s'ils vouloient détruite leurs idoles, afin de ne plus adorer que Dieu, ils seroient heureux à l'avenir, & que Dieu les délivreroit dela tyrannie des Philiftins. Lors qu'ils curent témoigné vouloir écouter sa voix, & qu'ils eurent en effet renversé les idoles de Baal & d'Aftaroth, Samuel leur commanda de s'afsembler à Maspha, afin qu'il y priast pour eux. Quand ils y furent arrivez ils reconnurent leurs déreglemens passez. Ils ordonnerent un jeûne folemnel. Ils s'humilierent devant Dieu & luy confefferent leurs offenfes, le conjurant de leur pardonner leurs fautes, & de recevoir favorablement l'holocaufte que Samuel son Prophete luy alloit offrir pour eux. Lors qu'ils estoient dans ces sentimens de pieté, ils furenr furpris d'apprendre que les Philistins marchoient pour les venir combattre. Ces ennemis du peuple de Dieu estant enflez de leurs profperitez paflées, & scachant que les Juifs s'estoient tous assemblez à Maspha, crûrent que c'estoit une occafion de se défaire d'eux en un seul jour; & ne scachant pas que Dieu de qui dépend la victoire, s'estoit reconcilie avec fon peuple à la priere de Samuel, ils esperoient mesme fuccés de leur entreprise, qu'ils avoient éprouvé peu auparavant. Samuel offrit son holocaufte à Dieu, & il luy fut fi agreable, qu'il lança au mesme moment de grands tonnerres contre les Philiftins. Ils en furent si épouvantez, qu'ils prirent la fuite d'euxmesmes. Les Ifraëlites en tuerent plusieurs & les poursuivirent long-temps. Ainfi Samuel par cet holocaufte, qu'il offrit à Dieu pour le reconcilier avec son peuple, rendit la paix aux Juifs en faisant cesser les dereglemens qui leur avoient attiré la guerre ; & il les gouverna depuis avec un foin & un amour de vray pere. Mais sa vieillesse arresta le cours de toutes ces profperitez. Car Samuel eut des enfans qui ne luy ressembloient en rien. Ils ne s'appliquoient qu'à fatisfaire leur avarice, & ils faifoient un honteux trafic de la justice & des jugemens corrompus. Les Juifs donc crûrent que c'estoit une occafion favora ble du M. 2909. ble pour demander à estre gouvernez par un Roy L'an comme les autres peuples du monde; & ils se lafferent d'estre gouvernez de Dieu mesme par l'entreSamuel mise de ses ministres. Samuel fut extrémement affliétent] gé de cette proposition. Il s'en plaignit devant Dieu, âgé de 60 ans & Dieu luy témoigna que c'estoit sur luy-mesme & ayant que cette offense retomboit. Il luy commanda neanover moins de leur accorder ce qu'ils defiroient. Mais il puis la voulut auparavant que Samuel les avertist de tout ce elique ce nouveau Roy exigeroit d'eux; ce qui n'estonna point ce peuple, qui vouloit en ce point estre sem& de blable aux autres nations du monde. On admire, de mort 21. an La mef me ann. comme remarquent les saints Peres, que les Juifs ayent préferé le gouvernement d'un homme à celuy de Dieu, & on n'admire point que les Chreftiens aiment mieux avoir le Demon pour chef & pour Roy, que JESUS-CHRIST mesme dont ils font les membres. Car nous disons souvent du Sauveur, comme le Juifs disent de luy dans l'Evangile: Nous ne voulons point que celuy-là regne fur nous, & nous disons souvent au-contraire au Demon, non de bouche, mais de cœur : Vous estes nostre Roy & nous sommes vos sujets. Nous ne voulons point reconnoître l'empire de Dieu sur nous; mais nostre loy comme la vostre, est nostre volonté propre: & nous ne voulons dépendre que de nous-mesmes. D Sacre de Saül. 1. Rois 8. Ieu voulant accorder à son peuple le Roy qu'il luy demandoit, élut Saül de cette forte. Cis fon 2909. pere ayant perdu ses Asnesses envoya Saül son fils les Avant chercher. Il ne les trouva point, & il estoit prest de J.C. s'en retourner, si le serviteur qui l'accompagnoit ne luy eust dit qu'il pourroit en sçavoir des nouvelles par Samuel, qui éclaircissoit tous les doutes de ceux qui le confultoient. Ils allerent donc le chercher, & l'ayant trouvé, Dieu déclara à Samuel que c'estoit cet homme qu'il avoit choisi pour eftre Roy, & pour 1095. détout délivrer son peuple de la violence des Philiftins. Ce saint Prophete le receut chez luy, & le traita avec toute forte de respect & de bonté; & aprés qu'il luy eut fait passer la nuit dans une chambre qu'il luy prepara, il l'accompagna le matin pour s'en aller ensemble. Il fit retirer le serviteur qui les suivoit, il prit Saül à part, répandit une petite fiole d'huile fur sa teste pour le sacrer Roy, & l'embrassa pour le saluër dans cette nouvelle dignité. Pour preuve que tout ce qu'il luy avoit dit estoit dans l'ordre de Dieu, il luy declara que dans un certain lieu qu'il luy marqua, il trouveroit des personnes qui luy diroient que les Asnesses qu'il cherchoit, estoient retrouvées, & que fon pere n'estoit plus en peine que de luy. Qu'un peu apres il trouveroit un grand nombre de Prophetes avec lesquels ils prophetiseroit aussi luymefme. Cet homme fi heureux felon le monde, qui en cherchant des Asnesses avoit trouvé un Royaume, ne dit rien à fon pere de ce qui s'estoit passe; & Dieu voulant le déclarer Roy publiquement devant |