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Abigail. 1. Rois 25.

A vie que David menoit depuis que Saül fe fut

L'An

du M.

Ldéclaré fon ennemy, eftoit tout-à-fait déplora- dy

J. C.

ble. Il fuyoit comme un vagabond, de montagne en Avant montagne, & de caverne en caverne, & il trouvoit par 1059. tout des perfonnes qui le trahiffoient, afin que tant de travaux par lefquels il achetoit fon nouveau royaume, le rendiffent dans la fuite de fon regne, plus humble que ne l'avoit efté Saül, qui s'eftoit veu tout d'un coup dans la grandeur & dans la poffeffion paifible de fa couronne. La plus grande peine de David en cet eftat, eftoit ce que fouffroient les quatre cens hommes qui s'eftoient retirez auprez de luy, & qui l'accompagnoient par tout. Lors qu'il fut échappé du peril où il fe vit de perdre la vie dans le defert de Ziph, dont les habitans le trahirent; & qu'il taschoit de trouver quelque foulagement à la faim que tant de

L'An

fuites & tant de courfes avoient caufée à fes gens, il en envoya dix chez Nabal, qui eftoit un homme fort riche, mais brutal & infuppo:table. Ces perfonnes Juy ayant reprefenté de la part de David leur maiftre, que bien-loin de luy avoir fait aucun tort dans tout ce qu'il poffedoit, durant tout le temps que fes gens aâgé de voient efté proche de fes terres, il avoit au-contraire pres de défendu & confervé tout fon bien, & que cette con

2947

011

mourut

Samuel

cent

ans.

duite meritoit bien quelque reconnoiffance; Nabal leur répondit infolemment, qu'il ne leur donneroit rien, qu'il ne fçavoit qui eftoit David, & que tout le monde eftoit plein de ferviteurs fugitifs qui fe cachoient de leurs maiftres. David fut faili d'une étrange indignation, lors qu'on luy eut fait ce raport. II trouva ce refus injufte, & ce mépris infupportable, & il s'en alloit de ce pas en tirer vengeance, en exterminant par une chaleur de colere trop violente Nabal & avec luy toute fa famille. Mais Abigail femme de Nabal, qui eftoit une perfonne incomparable, & aufli fage que fon mary eftoit infenfe, alla promptement au devant de David, lors qu'il venoit tout perdre, & luy parla avec tant de foûmiflion & tant de fageffe, que fa conduite & les prefens dont elle accompagna fes paroles calmerent la colere de David, & luy firent concevoir la grandeur de la faute qu'il alloit faire, en perdant une femme d'un fi grand mérite. Abigail aprés cette glorieufe victoire revint chez elle fans rien dire à fon mary de ce qui s'eftoit paflé, parce qu'il eftoit enfeveli dans le vin. Lelendemain lors qu'il apprit ces nouvelles, il fut faifi d'une fi grande frayeur, que dix jours aprés il en mourut, par une mort qui venoit de Dieu, & qui vengea plus innocemment David qu'il ne fe fuft vangé Juy-mefme. Aufli toft aprés David demanda en mariage Abigail, qui par fa modeftie fe jugea indigne de cet honneur. Mais fa refiftance ne fervit qu'à faire voir qu'elle meritoit par fon humilité ce qu'elle avoit déja merité par fa fageffe, & elle devint ainfi femme d'un Prince dans l'adouciffement duquel elle avoit donné peu auparavant un exemple rare de la

ma

maniere dont on doit adoucir la colere des Souverains, lors mefme qu'elle n'eft pas jufte; comme David en defarmant tout d'un coup fa colere, & étouffant fes reffentimens à la feule remontrance de cette femme, fut felon faint Ambroife, un grand exemple aux Rois de ne mettre pas leur gloire à pouffer jufqu'au bout leurs violences, & de ne pas croire qu'il foit indigne d'un Souverain de ceder à la raifon, & de fe retirer d'un engagement auffi-toft qu'ils reconnoiffent que leur autorité fe trouve commife contre la justice.

David épargne Saül. 1. Rois 26.

S

Aul perfecutoit David avec tant de violence, que La mé.

me an

pee

forces de fon Royaume. Il vint enfin l'affieger dans le 2927.

1

defert

1

1057.

Avant defert de Ziph, & il s'y opiniaftra à vouloir prendre J.C. à quelque prix que ce fuft celuy que fon envie luy reprefentoit comme le plus cruel de fes ennemis. Lors qu'il paffoit les nuits avec toute fon armée, & qu'il dormoit dans ce defert, David par un courage qui luy eftoit infpiré de Dieu, vint feul avec Abifai le trouver durant la nuit dans fa tente. Il vit que non feulement Saul, mais Abner fon Capitaine des gardes, & tous fes Officiers eftoient dans un profond fommeil, comme n'ayant à poursuivre qu'un ennemy dont ils n'avoient rien à craindre, & qui devoit tout craindre d'eux. Abifaï reprefenta alors à David, que Dieu livroit luy-mefme fon ennemy entre fes mains, & qu'il pouvoit en un moment fe délivrer de toutes fes peines. Mais David refpectant en fon ennemy l'onction fainte dont il avoit efté facré Roy; non feulement refufa de mettre la main fur luy, mais ne voulut pas mefme permettre à Abifaï de le faire. Ilfe contenta d'emporter fa lance & fa coupe : & lors qu'il s'en fut allé, il appella de loin Abner pour le réveiller. Il luy reprocha cette negligence avec laquelle il gardoit fon Prince, & qui le rendoit digne de mort. Il luy demainda où eftoit la lance & la coupe de Saül. Saül fe réveilla à ce bruit, & entendant la voix de David, il luy témoigna quelque bonté en apparence, & l'appella mefme fon fils. Mais David luy demanda avec une tendreffe admirable pourquoy il perfecutoit avec tant d'animofité un de fes ferviteurs, qui n'eftoit que comme un chien mort au prix de luy. Il luy reprefenta l'innocence de toute fa vie, & il finit en luy difant, que fi c'eftoit le Seigneur qui l'irritoit contre luy, il prioit Dieu d'agréer fon facrifice: mais que fi c'eftoient les hommes qui l'animoient à la vengeance, & qui le portoient à le chaffer de l'heritage du Seigneur, ces hommes quels qu'ils fuffent eftoient maudits de Dieu. Saül n'eut rien à répondre à la justice de ces plaintes. Il avoüa qu'il avoit peché. Il reconnut publiquement fa folie, & il confeffa qu'il avoit ignoré beaucoup de choses. Il le laiffa donc en paix, & David luy renvoyant fa lance, conjura Dieu,

que

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que comme il venoit de témoigner que la vie de Saul
avoit efté precieuse à fes yeux, fa vie de mefme le fuft
aux yeux du Seigneur, & qu'il le délivraft de tous
fes maux. Tous les faints Peres ont relevé cette ac-
tion de douceur par leurs louanges. Saint Ambroise
admire qu'un homme qui pouvoit en un moment
s'affurer la vie & le royaume par la perte de celuy qui
cherchoit à le tuer fi injuftement, ne l'ait pas fait
lors qu'il pouvoit tuer fon ennemy fans eftre veu de
perfonne, & qu'il ait mieux aimé demeurer toûjours
dans un peril extréme. Ce qui redouble la gloire de
cette action, eft qu'il n'attendoit de Saul aucune re-
connoiffance de la douceur, comme il en avoit eu
un exemple depuis peu, n'ayant point voulu tuer
Saul dans une caverne où il s'eftoit retiré, fans fça-
voir que David y eftoit caché avec ses gens. Car s'ef-
tant contenté de couper un morceau de fa robe fans
le toucher, Saul admira cette generofité de David, &
ne laiffa pas neanmoins de le pourfuivre depuis com-
me auparavant. Cette douceur dans un temps où l'on
n'avoit pas encore veu celle du Fils de Dieu fur la ter-
re, doit bien confondre les Chreftiens, qui s'ima-
ginent qu'il leur foit permis de pouffer auffi loin
qu'ils peuvent leur animofité & leur vengeance con-
tre leurs freres.

D

Voleurs de Siceleg. 1. Rois 30.

2949.

Avid voyant enfin que la colere de Saül eftoit L'A irreconciliable, chercha fa feureté hors de fon du M. pays, & s'enfuit chez le Roy Achis qui le traita bien Avaat & luy donna la ville de Siceleg. Mais cet engagement J. C. jetta David dans un eftrange embarras. Carles Phili-1955. ftins armant contre Saül, Achis obligea David de venir avec luy à la guerre, & de combattre pour les Philiftins contre fon Prince. Dicu neanmoins le délivra par une rencontre heureufe de cette fafcheufe conjoncture. Car les Philiftins craignant que David ae les trahist & ne les livraft à Saül, prierent le Roy

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