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jours marquez emporta feptante mille hommes. Ce que David fit pendant cette playe, eft un grand exemple pour les Rois, de la tendreffe qu'ils doivent avoir pour leurs peuples, & apprend bien aux Pafteurs de l'Eglife comment ils doivent s'offrir à Dieu comme une victime pour les ames dont ils font chargez. Car ce Prince fe regardant comme la caufe des maux que fouffroit fon peuple, jeta vers Dieu fes foupris ardens: C'eft moy, dit-il, qui ay peché; c'eft moy qui ay fait une injuftice: Qu'ont fait ces brebis que vous frappez ? Tournez pluftoft voftre fureur contre moy & contre toute ma maison. Dieu enfin s'appaifa & fit ceffer cette playe. Il commanda à l'Ange exterminateur de s'arrefter; & il apprit par cet exemple, comme remarquent les faints Peres, qu'il fçait fe vanger fur les peuples des pechez de ceux qui les conduifent, comme il s'appaise fouvent lors que les Pafteurs ont foin de détourner fa fureur & d'attirer fes mifericordes fur les perfonnes qu'il leur a foumises.

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Salomon Roy. 3. Rois 1.

Avant

J.C.

eftant

A fin de la vie de David approchant, fa vieilleffe L'An donna lieu à fes enfans de brouiller, par le defir d M. qu'ils avoient de s'emparer de fon royaume eprés fa 2989. mort. Mais lors que tout le monde eftoit en fufpans pour fçavoir qui feroit fon fucceffeur, Adonias l'aîné fois. de tous les enfans de David aprés Abfalom qui eftoit David mort, ne put attendre la mort de fon pere, & dans alors l'impatience de regner, il fit un feftin magnifique où âgé de il invita tous les grands qu'il avoit infenfiblement ga- & Sâlognez, afin qu'au milieu du feftin ils le déclaraffent mon de Roy. Lors que le jour pris pour cette conjuration fut 18. arrivé, Nathan le Prophete inftruit de ce qui fe paffoit, & qui fçavoit que Dieu avoit refolu de faire regner Salomon aprés David, vint trouver Bethfabée pour la porter à parler au Roy, afin de l'informer de l'entreprise d'Adonias, & de le faire fouvenir de la

pro

70. ans

promeffe qu'il luy avoit faite, de laiffer fon royaume à Salomon. Nathan entra lors que Bethfabée parloit encore à David, & luy demanda fi c'eftoit par fon ordre qu'on déclaroit Adonias Roy. David ne differa pas davantage, & ordonna fur l'heure qu'on allaft faorer Salomon, & qu'on le fift affeoir fur fon trône. Cette nouvelle s'eftant auffi-toft répanduë de tous coftez, intimida de telle forte tous ceux qui eftoient avec Adonias, que leur affemblée fut toute diffipée, & qu'Adonias luy-mefime ne chercha plus qu'à fauver fa vie en tenant les cornes de l'Autel. Salomon promit neanmoins de ne luy rien faire, pourveu qu'il demeuraft en repos. Quelque fix mois aprés Dieu tira David de ce monde, aprés avoir donné à Salomon les avis qu'il luy croyoit neceffaires, & les ordres qu'il devoit executer. Adonias enfuité fit demander Abifag pour l'époufer, qui eftoit une jeune fille d'une beauté & d'une vertu rare, que l'on avoit choisie dans tout Ifraël pour fervir David dans fa grande vieilleffe. Mais Salomon penetra dans fon deffein qu'il crut dange

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du M.

1013.

Salo

reux, & le fit mourir. Il fit auffi mourir Joab General
de l'armée de David, par le commandement que fon
pere luy en laiffa en mourant. Il fit la mesme chose à
Semei, qui avoit chargé David de tant d'outrages lors
qu'il fuyoit fon fils Abialom. Il l'avoit traité d'abord
avec douceur, & il s'eftoit contenté de luy ordonner
de ne point fortir de Jerufalem fur peine de la vie.
Mais trois ans aprés, deux de ses esclaves s'estant en-
fuis il monta à cheval pour les poursuivre: Ce qui
ayant efté rapporté à Salomon il le fit mourir. Salo-
mon fe voyant fi heureusement estably dans fon
royaume, rechercha l'alliance du Roy d'Egypte dont L'AR
il époufa la fille. Peu de temps aprés, Dieu luy appa- 2991.
rut en fonge. Il luy témoigna qu'il l'aimoit à caufe Avang
de David fon pere, & il luy offrit de luy donner tout J.C.
ce qu'il luy demanderoit. Ce Prince confiderant De l'a-
qu'il eftoit Roy d'un grand peuple, que cette dignité ge de
devoit eftre foutenue par une grande prudence, & mon le
que plus elle l'élevoit, plus elle l'engageoit à de gran- 20. de
des chofes, crut que ce qui luy eftoit le plus neceflaire
eftoit la Sageffe, pour bien gouverner fes Eftats. Dieu le 3.
fut touché d'un choix qui témoignoit que ce jeune
Roy avoit déja ce qu'il démandoit. Il luy promit de
faire qu'il n'y auroit eu ny devant ny aprés luy per-
fonne qui l'égalaft en fageffe. Et pour luy faire voir
combien il agréoit qu'il euft préferé cette demande
aux autres biens, il promit de les luy donner comme
par furcroift, & de le rendre le plus riche & le plus
magnifique Roy de tous ceux qui l'avoient precedé,&
de tous ceux qui le devoient suivre. L'exemple de ce
jeune Prince apprend aux Rois chrestiens à estimer
peu les biens, les honneurs & les plaifirs, & à n'eftablir
pas leur grandeur à difputer de la magnificence avec
les Rois infidelles & idolâtres, dont ils ne fçauroient
fouvent égaler ni la puiffance ni les richeffes; mais à

ettre leur principale gloire à eftre les veritables
images du Dieu qu'ils adorent, en fe rendant sembla-
bles à luy par leur fageffe, qui eft pour eux la fource
de tous les biens, & par leur juftice que le mefme Sa-
lomon appelle l'affermiffement de leur trône.

fon

gne.

re

Jugement de Salomon. 3. Rois 3.

La mê

me an

née. 2991.

Alomon ayant receu de Dieu le don de Sageffe, il fe prefenta auffi-toft aprés une occafion qui la fit poroiftre dans fon éclat, & qui en répandit la reputation dans toute la terre. Deux femmes de mauvaise vie le vinrent trouver pour le prier de juger leur differend. L'une des deux luy dit, que lors qu'elles demeuroient toutes feules dans une mefme maison, elley accoucha d'un fils ; que trois jours aprés l'autre accoucha auffi d'un fils qu'elle étouffa la nuit, & que s'étant levée doucement, elle luy avoit pris le fien lors qu'elle dormoit & luy avoit mis fon enfant mort en fa place. Que le matin s'eftant levée pour donner à teter à fon petit & Je trouvant mort, elle le regarda attentivement, & reconnut que ce n'eftoit point fon fils. L'autre femme nioit fortement ce que la premiere avoit dit, & foutenoit que c'eftoit fon enfant qui eftoit vi

vant, & que celuy qui eftoit mort eftoit à celle qui luy difputoit maintenant le fien. Une affaire si brouillée fans preuves, fans témoins, qui s'eftoit paffée dans la folitude d'un logis & dans le filence de la nuit, eut befoin d'un Roy auffi éclairé qu'eftoit Salomon, qui témoigna en cette rencontre qu'il avoit, comme il est dit de luy, une connoiffance claire de toute la nature, non feulement en ce qui regarde les plantes & les arbres ou les animaux, mais en ce qui regarde mefme les fentimens les plus cachez du cœur humain, & les affections les plus tendres des meres pour leurs enfans. Il fe fit apporter une épée & prononça cet arrest qui paroiffoit bien étrange: L'une dit; Cet enfant qui vit eft à moy, & l'autre foutient qu'il eft à elle : qu'on le divife en deux, & que chacune en ait la moitié. La fautfe mere confentit d'abord à ce jugement. Mais la veritable fentant toutes fes entrailles émeuës, conjura le Roy de le donner pluftoft tout entier à celle qui le luy vouloit ravir. Ce fut alors qu'on reconnut veritablement la vraye mere, & qu'on admira l'adresse dont Salomon s'eftoit fervi pour la découvrir. Il fit voir la verité de ce qu'il dit luy-mefme dans fes Proverbes qu'un Roy eft affis fur fon trône en quelque forte l'efprit de devination fur les lévres; qu'il eft difficile que rien échape à fa prudence, & qu'il fçait perfaitement difcerner la verité d'avec le menfonge. Les faints Peres remarquent que la figure de ces deux femmes reprefente excellemment la difference qui fe trouve entre les faux & les veritables Pasteurs. Les faux Pafteurs accufent les veritables de tuer les ames, lors que ce font eux-mefmes qui les tuent, & ils fe fervent de cette impofture pour femer des troubles & des divifions dans l'Eglife. Les vrais Pasteurs aucontraire ont des entrailles de mere pour les peuples qui leur font commis. Ils ne cherchent que le falut de leurs enfans, & non leur propre gloire; & ils aiment mieux ceder à la domination des injuftes, qui arrachent d'entre leurs mains les ames qu'ils nourriffoient de la parole de vie, que de fouffrir qu'on divife à caufe d'eux l'unité du corps de l'Eglife de Dieu.

M 2

Tem

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