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ham crût fans hefiter cette parole de Dieu qui lui promettoit deux fi grands avantages, le premier de le rendre la tige d'une grande race, & l'autre de benir toute la terre dans celuy qui fortiroit un jour de fon fang. Ainfi il quitta fon païs avec Tharé fon pere, pour venir à Haram ville de la Mefopotamie, où fon pere eftant mort, il vint de Haram en la terre de Chanaan avec Sara fa femme & Lot fon neveu. Lorsqu'il y fut arrivé, Dieu luy promit encore une fois de luy donner tout le païs où il eftoit, & Abraham adorant Dieu qui difpofoit fi fouverainement des royaumes, & qui les donnoit ou les oftoit comme il luy plaifoit, dreffa un Autel en ce lieu pour y invoquer fon nom. Eftant demeuré quelque temps en ce païs il y arriva une grande famine qui l'obligea d'aller en Egypte avec Sara & le refte de fa maison. Mais prévoyant que la beauté de Sara fa femme pourroit luy nuire, & que les Egyptiens en devenant paffionnez pourroient penfer à tuer le mary, afin de poffeder en fuite la femme fans aucun obftacle, il ufa d'une fageffe innocente, & pria Sara de dire qu'elle eftoit fa four, comme elle pouvoit en effet le dire fans ufer d'aucun menfonge, afin qu'au lieu de le tuer comme ils l'euffent fait fi elle euft paffé pour fa femme, ils luy fiffent au contraire de bons traitemens en la regardant comme fa fœur. Ce qu'Abraham avoit préveu arriva. Les Egyptiens admirant Sara en parlerent à Pharaon qui la fit venir en fon palais, & on traita favorablement Abraham comme fon frere. Mais Dieu fceut bien délivrer la pureté de Sara d'entre les mains de Pharaon, & il affligea ce Prince de tant de playes, qu'en cherchant quelle pouvoit en eftre la caufe, il connut enfin que Sara eftoit la femme d'Abraham, qu'il luy rendit auffi-toft en fe plaignant feulement qu'il ne le luy euft pas dit d'abord; Tant ce Prince, dit faint Ambroife,quoi qu'idolatre avoit horreur de l'adultere, & craignoit de bleffer un étranger que la famine obligeoit de fe retirer dans fes Eftats. Ce fut ainfi que Dieu commença d'appeller à luy celuy qu'il avoit choifi pour eftre le pere de tous les fidelles. Il le trai

ta

ta felon la fermetê de fa foy; luy faifant quitter fon païs où il eftoit puiffant pour l'etablir dans une terre où il trouva d'abord une famine mortelle, qui le contraignit d'aller courir mille hazards parmy des peuples étrangers fans y trouver d'autre confolation que de fçavoir qu'il y eftoit par l'ordre de celuy à qui fa foy avoit rendu une fi promte obeïffance. Mais Dieu luy fit bien voir en le delivrant de tous les perils, qu'on ne doit jamais rien craindre en fuivant Dieu, & que lors que nous nous expofons à quelques fafcheux évenemens pour eftre fidelles à fa parole, il eft luymefme noftre protecteur qui nous tire avec avantage de tous les maux qui nous environnent.

Lot fe fepare & Abraham. Genef. 13.

A

Braham eftant revenu de l'Egypte avec Sara fa L'An femme & Lot fon neveu au lieu d'où ils eftoient du M. partis, c'eft à dire en Bethel, il éprouva bientoft le Avant malheur qui devoit à jamais accompagner les richef J.C.

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Les. 1920.

fes. Car comme ils eftoient tous deux fort riches il arriva des querelles entre les pafteurs de leurs trou peaux, qui firent voir, comme dit l'Ecriture, qu'ils ne pouvoient plus demeurer ensemble, & qu'une mefme terre ne les pouvoit plus contenir. Abraham eut horreur de ces querelles, & prévoyant les fuites funeftes que ces divifions entre les domestiques peuvent avoir, en paffant des ferviteurs aux maiftres mefme, l'averfion qu'il en conceut dans fon cœur le porta à les prévenir par une promte feparation. C'eft pourquoy il alla trouver Lot, & luy dit: Qu'il n'y ait point de querelles je vous prie entre vous & moy, ny entre vos pasteurs & les miens; car nous fommes freres, c'est à dire proches parens. Toute la terre eft à votre choix: je vous prie feulement de vous retirer: fi vous allez à la gauche, je me tiendray à la droite: fi vous allez à la droite, j'iray à la gauche. Mais Lot ne témoigna pas en acceptant cette offre la mefme fageffe, qu'Abraham avoit témoignée en la luy faifant. Car ne penfant pas affez quelle perte c'eftoit pour luy que de fe feparer d'avec un tel homme, & ne voyant pas qu'il luy falloit plutoft faire toute autre chofe que de fouffrir une telle feparation, il fe rendit fans grande refistance à ce qu'Abraham luy difoit, & s'engagea avec trop peu de prudence, comme dit faint Ambroife, dans une fource de mille perils, Il ne s'appliqua donc qu'à choisir de quel costé il devoit aller, & ne confultant dans ce choix que fes yeux, il prit pour luy le païs qui luy fembla le plus beau & le plus riant, & vint demeurer à Sodome. De la compagnie du plus faint homme qui fuft alors fur la terre, il tombi dans la compagnie des plus fcelerats d'entre les hommes; & en fe feparant un peu trop legerement de fon oncle, il vint dans une ville que Dieu regardoit déja dans fa fureur, & dont il ne pouvoit plus fouffrir les crimes. On voit dans cette hiftoire, comme remarque le mefme faint Ambroife, deux chofes tres-importantes. On voit dans la conduite d'Abraham l'horreur qu'on doit avoir des moindres difputes, & combien on doit fe défier en

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ce point des ferviteurs qui en font fouvent les anteurs, & qui mettent leur plaifir & leur esprit à les pouvoir entretenir. Mais on voit auffi dans Lot de quelle importance il eft, principalement aux perfonnes plus jeunes, d'abandonner trop facilement ceux dont la compagnie éftoit tout leur bonheur fans qu'ils y penfaffent, & qui leur font plus neceffaires qu'ils ne le croyoient. Une feparation faite avec trop peu de circonfpection a des fuites qui fe font fentir dans toute lavie: & quoy que Lot fuft jufte, comme dit faint Pierre, on tremble neanmoins lors que l'on confidere les perils où il fe trouva embaraffé enfuite, dont la charité de celuy-la feul duquel il s'eftoit feparé l'euft pú delivrer, & qu'il auroit prévenus s'il fuft toûjours demeuré dans une fi fainte compagnie.

PE

Abraham délivre Lot. Genef. 14.

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Eu de temps aprés la feparation de Lot d'avec L'An Abraham, il furvint un évenement qui fit bien de M. voir qu'Abraham ne l'avoit pas propofée par un re- Avant froidiffement d'affection, & que Lot l'avoit fouffer- J. C. te avec trop peu de fage Te. Quatre Rois s'eftant unis 152, enfemble & ayant ravagé tout le païs d'auprés de Sodome, le Roy de Sodome & ceux des quatre autres villes voisines fe joignirent enfemble pour refifter à ces Princes, & pour les défaire. Mais les cinq Rois furent battus par ces quatre Princes, & le Roy de Sodome s'enfuit avec les quatre autres fes alliez. Les quatre Rois fe voyant victorieux allerent à Sodome pour en remporter un riche butin; & entre les autres captifs ils prirent Lot avec tout ce qu'il poffedoit. Un homme échappé du combat vint promtement ap porter ces nouvelles à Abraham, qui eftant touché dans le fond du cœur du malheur de fon neveu, ne. s'amufa point à le pleurer, mais penfa promtement à le délivrer d'entre les mains de fes ennemis. Il prit trois cens dix huit ferviteurs des plus courageux qu'il eut, & poursuivit ces quatre Rois. Dieu benit une

guerre

guerre que la feule charité avoit fait entreprendre à ce faint Patriarche, & dans laquelle il témoignoit bien vifiblement mettre plus fon efperance en Dieu que dans les forces de fes troupes. Il arresta avec ce perit nombre de gens le cours des victoires de quatre Rois, & fit ce que cinq Rois unis enfemble n'avoient pû faire. Car s'eftant jetté avec fes gens fur ces quatre Princes, il les défit, les tailla en pieces, & pourfuivit fort loin ceux qui fe fauvoient par la fuite. Il retira ainsi Lot d'entre leurs mains avec tout ce qu'ils luy avoient pris, & le Roy de Sodome apprenant une action fi glorieufe, vint au devant d'Abraham pour luy, en temoigner fa joye. Ce fut en cette recontre que parut Melchifedech cet homme fi fameux, & que l'Ecriture appelle le Prêtre du Dieu tres-haut, qui offrit alors du pain & du vin, que tous les faints Peres on regardé comme une admirable figure du facrifice de l'Eglife que JESUS-CHRIST le vray Pref tre felon l'ordre non d'Aaron, mais de Melchifedech, y devoit établir pour durer jufques à la fin des

fiecles.

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