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le faire mourir s'il touchoit à cette femme, & l'avertit qu'Abraham eftoit fon mary. Abimelech fut étrangement furpris de fe voir prefque tomber fans le fçavoir dans un auffi grand crime qu'eft l'adultere; mais il reprefenta à Dieu la fimplicité avec laquelle il avoit agy en cette rencontre, & qu'on luy avoit celé la verité, puis qu'on luy avoit dit que Sara n'eftoit que la foeur d'Abraham. Dieu receut fon excufe, & luy dit que c'eftoit en effet pour cette raifon qu'il l'avoit voulu preferver d'un fi grand crime, témoignant affez par là le jugement qu'il fait de ceux qui ofent fouiller la pureté des mariages par des alliances impudiques. Abimelech effrayé & des menaces de Dieu & de l'idée du crime qu'il eftoit fi prés de commettre, fe leva au milieu de la nuit & appella fes officiers, aufquels il declara ce qu'il venoit de reconnoiftre, il fit venir auffi Abraham; & fe plaignit de ce qu'il luy avoit déguisé la verité, & luy demanda en quoy l'avoit offenfé, pour attirer tant de maux fur fa perfonne & fur fon royaume. Et comme il continuoit

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il

toû

toûjours de fe plaindre de fa conduite, Abraham luy répondit, que lors qu'il eftoit entré dans fa ville, il ne fçavoit fi fon peuple avoit quelque crainte de Dieu, & que l'apprehenfion qu'il avoit qu'on ne le tuaft pour avoir enfuite fa femme, l'avoit porté à prier Sara de dire qu'elle eftoit fa four, comme en effet elle l'eftoit & qu'il n'avoit fait à fon égard que ce qu'il faifoit dans tous les autres lieux où il alloit, dans lefquels il gardoit la mefme conduite. Abimelech receut fa fatisfaction, & rendit Sara à Abraham, auquel il donna de grands prefens tant en argent qu'en troupeaux; & en fe feparant de Sara, il luy dit en riant, qu'il avoit donné à fon frere, comme elle l'appelloit, mille pieces d'argent; afin, dit faint Ambroife, qu'elle en achetaft un voile pour se couvrir, & pour faire connoiftre à l'avenir à tout le monde qu'elle eftoit une femme mariée. Il la pria auffi de fe fouvenir du mal qu'elle luy avoit penfe caufer, afin qu'elle évitaft de le faire à d'autres. Abraham en s'en allant pria Dieu pour Abimelech, & Dieu guerit auffi-toft toutes les playes dont il avoit frappé ce Prince, & avec luy toute fa maifon, à caufe de Sara qu'il avoit prife. C'eft ainfi, comme remarque faint Ambroife, que Dieu témoigna combien il haïffoit l'adultere, & que comme il eftoit l'auteur du mariage, il prenoit auffi le foin de vanger tout ce qui en violoit la fainteté. Il s'eft contenté d'avoir témoigné ainfi autrefois l'horreur qu'il avoit de ce crime. If ne parle plus de la forte maintenant; mais on n'en doit pas moins craindre fa juftice, comme a dit le mefme Pere, ny croire qu'il punira moins l'adultere, parce qu'on le commet avec moins de fcrupule & avec plus de licence:

Ifmaël chaffe. Genef. 21.

1108.

Avant

Ieu ayant accomply la promeffe qu'il avoit faite An à Sara, elle eut un fils dans fa vieilleffe, au du M. temps que Dieu luy avoit marqué. Abraham luy donna le nom d'Ifaac, & il le circoncit le huitiéme J. C. jour. Sara voulut en le nourriffant elle mefme, quoy 1896. qu'elle fuft confiderée comme une grande Princeffe, apprendre à toutes les meres, comme dit faint Ambroife, que leur gloire & leur joye doit eftre de nourrir leurs enfans, & qu'elles ne font meres qu'à demy lors qu'elles manquent à ce devoir de la nature, qui entretient beaucoup davantage dans toute la fuite de la vie, l'amour reciproque qui doit eftre entre les 2113meres & leurs enfans. Lors que le temps de fevrer Avant fon fils fut venu, elle fit un grand feftin pour témoi-1891. gner fa grande joye, qui effoit la figure de la joye fac que reçoivent les vrais Pafteurs de l'Eglife, lors

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l'An

du M.

J.C.

deja 5.

qu'ils ant

qu'ils voyent que leurs enfans s'avancent dans la pieté, & qu'ils n'ont plus befoin qu'on les nourriffe de lait. Mais lors que Sara fe voyoit ainfi comblée de joye, & que ce nouveau fils la confoloit de la douleur & de l'opprobre de fa fterilité paffée; le fils d'A-· gar luy caufa autant de chagrin que la mere luy en avoit caufé elle-mefme quelques années auparavant. Cet enfant qui fe voyoit fruftré de fes grandes efperances par la naiffance d'Ifaac qu'il regardoit avec douleur devoir eftre l'heritier de tant de biens qu'il s'eftoit déja promis, ne pût fouffrir la joye que le pere & la mere d'Ifaac témoignoient prendre dans luy, & conceut contre luy une envie fecrette qui paroiffoit au dehors dans les rencontres, par la maniere injurieufe dont il le traitoit, & par les maux qu'il luy faifoit. Sara prévit les fuites funeftes que cette divifion pourroit avoir, & fa tendreffe s'intereffant pour celuy qu'elle fçavoit avoir esté destiné de Dieu pour eftre l'heritier de tous fes biens, elle pria Abraham de chaffer du logis Agar fon efclave avec fon fils Ifmaël. Abraham fut d'abord bleffé de cette propofition. Mais Dieu luy ayant dit de faire en ce point tout ce que Sara luy difoit; Abraham prit un pain & un vafe d'eau qu'il mit fur l'épaule d'Agar, il luy donna fon fils Ifmael, & la renvoya. .Agar chaffée de ce logis alla dans le defert de Berfabée, où fon cau eftant manquée, elle mit fon enfant fous un arbre & fe retira fous un autre, pour ne pas voir mourir fon fils. Et lors qu'elle s'abandonnoit aux pleurs & aux gemiffemens, un Ange l'appella du ciel qui l'encouragea, & luy commanda de prendre foin d'Ifmaël, parce qu'il feroit le pere d'une grande race. Il luy montra enfuite une fource d'eau qui eftoit proche de ce lieu: ce fecours confola beaucoup Agar, & elle éleva fon fils dans la folitude, où il devint habile à tirer de l'arc. Saint Paul nous dit clairement luy-mesme, que Dieu dépeignoit deflors dans ces deux enfans ce qui devoit arriver un jour dans la fuite de toute l'Eglife, où ceux qui font les enfans de la promeffe devoient eftre perfecutez par leurs propres freres. Il faut que celuy qui

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yeut eftre Ifaac fouffre l'envie & les infultes d'Ifmaël. Mais bien loin de rendre mal pour mal, & envie pour envie, il doit plûtoft pleurer le malheur de fon frere qui eft banni pour toûjours de la maison paternelle. C'eft Dieu feul qui rend les uns enfans de celle qui eft libre, & les autres, de celle qui eft efclave; & il faut luy témoigner fa reconnoiffance d'un difcernement fi favorable, en choisissant plustost d'estre perfecuté avec Ifaac, que de perfecuter les autres avec Ifmaël, parce que la colere d'limaël fera paffagere, & que l'heritage d'Ifaac fera eternel.

Sacrificed Abraham. Genef. 22.

efté challe de la maison

Avant

Ifaac y vivoit en paix comme le feul heritier de M.2145 tous les biens de fon pere. Mais lors qu'il avoit déja 7 C. trente-fept ans, felon la tradition des Hebreux, Dieu 1859. pour tenter Abraham, luy ordonna de prendre ce fils bien-aimé, & de le luy aller immoler fur une mon

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tagne.

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