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tagne. Abraham fe fouvenant qu'il n'avoit ce fils que· de Dieu, n'hefita point à le luy rendre, & fa grande foy étouffa toutes les penfées qui pouvoient luy revenir dans l'efprit des promeffes que Dieu luy avoit fi fouvent reïterées, de luy donner par Ifaac une pofterité qui fe multiplieroit comme les étoiles du ciel. Il fe leva des le grand matin, & gardant un grand fecret, il prit avec luy Ifaac & deux de fes ferviteurs. Il coupa du bois pour faire brûler fon holocaufte, & alla enfuite au lieu que Dieu luy avoit montré. Ayant demeuré pendant deux jours entiers dans cette refolution fixe, fans que la veuë de fon fils pûft l'attendrir; le troifiéme jour enfin levant les yeux il vit de loin le lieu destiné à ce grand facrifice, & il commanda à fes deux ferviteurs de fe tenir au bas de la pour adomontagne, pendant qu'il iroit avec fon fils rer Dieu. Il prit le bois que l'on avoit coupé pour l'holocaufte & le mit fur les épaules d'Ifaac, qui en montant ainsi cette montagne chargé du bois qui le devoit confumer, fut une figure bien fenfible du veritable Ifaac, qui monta depuis la montagne du Calvaire chargé du bois fur lequel il devoit accomplir fon facrifice. Lors qu'Ifaac montoit ainfi avec fon pere qui tenoit dans fes mains le fer & le feu, il luy demanda où eftoit donc la victime qu'il devoit égorger. Abraham ayant comme oublié qu'il eftoit pere, repondit avec fermeté, que Dieu y pourvoiroit; & eftant arrivé au lieu que Dieu luy avoit marqué, il y dreffa un autel, y mit le bois que fon fils avoit apporté, lia Ifaac, le mit fur ce bucher, prit l'épée, & étendit la main pour l'égorger. Dieu fut touché de la fermeté du pere & de la foûmiflion du fils, & ne voulant pas que ce grand facrifice qu'il voyoit déja comme accompli, fuft teint du fang de l'hoftie, afin qu'il reprefentaft le facrifice non fanglant de nos autels, il arrefta par un Ange la main du pere, parce qu'il avoit enfin reconnu qu'il le craignoit veritablement, & qu'il n'avoit pas épargné fon fils unique. Et s'eftant trouvé auprés de ce lieu un belier embarraffe par les cornes dans un buiffon, Abra

ham

ham l'offrit à Dieu au lieu de fon fils, & s'en retourna. Cette hiftoire qui eft pleine de tant de myfteres, & dont toutes les circonftances eftoient autant de figures de ce qui devoit arriver à Je su S-CHRIST, eft felon les faints Peres; d'une grande instruction pour les peres & pour les meres, & elle leur apprend à n'avoir point de plus grande paffion pour leurs enfans que de les immoler à Dieu. Mais faint Chryfoftome ne peut affes déplorer le malheur de ces peres & de ces meres qui font profeffion d'estre chrestiens & qui immolent leurs enfans non à Dieu comme Abraham, mais au Demon, en les engageant dans la vanité du fiecle, & en corrompant leurs mœurs par l'exemple de leur mauvaïfe vie. Un feul Abraham, dit-il, offre fon fils Ifaac à Dieu, & une foule de perfonnes offrent leurs enfans au Demon; & la joye que nous avons de voir un petit nombre de perfonnes qui élevant leurs enfans avec quelque soin, est étouffée par la douleur que nous caufe le grand nombre de ceux qui les perdent, & qui meritent ou par leur ambition ou par leur negligence d'eftre confiderez plûtoft comme les parricides, que comme les peres de leurs enfans.

Mort de Sara. Genef. 23.

rendu

du M.

2145

commandement de celuy-là mefme qui le leur avoit donné contre l'ordre de la nature, confola de- Avant puis la vieileffe de Sara fa mere, qui mourut âgéeJ.C.. 1859 de cent vingt-fept ans; & trente-fept ans aprés qu'elle l'eut mis au monde, Abraham la pleura, & aprés avoir verfé fes larmes fur elle, il penfa à l'enterrer & à luy chercher un fepulchre. Ils s'adreffa pour ce fujet au peuple de Geth. Il leur reprefenta qu'il eftoit étranger dans leur païs, & les pria de luy donner le droit d'avoir un fepulchre parmi eux & d'y enterrer le corps de fa femme morte. Le peuple de Geth le traita avec toute la civilité poffible, en luy donnant

le

lenom de Prince de Dieu, & luy permit de choisir de toute leur ville le lieu qui luy agréeroit davantage. Abraham qui par une fainte generofité ne vou foit eftre redevable à perfonne d'aucune grace, témoigna fa reconnoiffance à ce peuple; & n'en voulant rien recevoir gratuitement, il les pria de faireagréer à Ephron un des principaux de leur ville, de luy vendre fon champ où il y avoit une caverne double, afin qu'il y pûft enterrer Sara. Ephron voulut le luy donner fans en recevoir d'argent; mais Abraham demeurant ferme dans fa maniere d'agir, obligea enfin Ephron de luy dire que le champ qu'il defiroit valoit quatre cens ficles d'argent; & lors qu'il continuoit toûjours à faire des inftances & à le prier d'accepter cette terre fans en rien païer, Abraham fit en prefence de tout le monde pefer l'argent qu'elle coûtoit, & ce contractestant ainfi paffé devant beaucoup de témoins, le champ d'Ephron appartint à Abraham, & il y enterra Sara fa femme. On ne peut affez admirer que ce faint homme ayant receu tant

de

de fois des affurances de Dieu, que cette terre où il eftoit luy appartiendroit un jour, n'ait jamais penfé neanmoins aprés cette promeffe fi fouvent reïterée à y acquerir autre chofe qu'un fepulchre pour luy & pour les enfans. La veue continuelle qu'il avoit du ciel luy ifoit méprifer toute la terre, où il ne vivoit pl que comme mourant toûjours. Et lors que Dieu penfoit à donner une longue pofterité à Abraham; & à cette pofterité une terre tres-fertile, Abrabam ne penfe qu'à fa mort & au fepulchre ; & à ne laiffer d'autre heritage à fes enfans que celuy qu'il prenoit pour luy-mefme durant fa vie, dans la pensée continuelle de fa mort. Ce faint homme fit bien voir ainfi qu'il meritoit le témoignage que faint Paul luy donne, que la terre de Chanaan qui eftoit la plus belle terre du monde, ou ne luy tenoit lieu de rien, ou qu'au plus elle ne luy fervoit que d'un miroir pour y contempler une autre terre invifible, comme parle le mefme Apoftre, dont il avoit l'efprit toûjours occupé, pouvant dire avec faint Paul, que tout le refte dés biens de la terre luy eftoit comme du fumier & des ordures..

A

Mariage d'Ifaac. Genef. 24.

du M.

Braham eftant vieux & penfant à marier Ifaac, L'an ne voulut point s'alier avec les filles du pays de 148. Chanaan. C'est pourquoy il ordonna à Eliezer fon Avant œconome d'aller dans la Mefopotamie chercher pour 1856. J.C. fon fils une femme qui n'attiraft point fur luy l'in- ans. dignation de Dieu. Eliezer y eftant allé & fe trouvant prés de la ville de Nachor, pria Dieu de luy montrer quelle eftoit celle qu'il avoit refolu de donner pour femme à Ifaac, & le conjura que lors que les filles de cette ville fortiroient pour puifer de l'eau, il la luy marquaft par ce figne; que quand il luy demanderoit un peu d'eau pour boire, nonfeulement elle luy en donnaft, mais qu'elle luy en oftritt mefme pour fes chameaux. Lorsqu'il faifoit à Dieu cette priere, Re

becca

becca qui eftoit parfaitement belle, fille de Bathuel, qui eftoit le fils de Melcha, femme de Nachor frere d'Abraham, fortit de la ville pour aller querir de l'eau; & lors qu'elle s'en retournoit, Eliezer alla au devant d'elle luy demander un peu d'eau pour boire. Elle luy en donna de tres-bon cœur, & luy en offrit mefme pour fes chameaux. Ce ferviteur fidelle ayant connu à cette marque que c'eftoit celle que Dieu. avoit deftinée pour eftre femme de fon jeune maiftre, luy donna fnr l'heure des pendans d'oreilles & des braffelets pour reconnoiffance d'un fi bon office, luy demanda qui elle eftoit, & s'il y avoit place chez fon pere pour s'y pouvoir retirer. Rebecca l'en affura, & fe hafta d'aller chez elle donner avis de ce qui venoit d'arriver. Laban fon frere ayant veu ces pendans d'oreilles, alla trouver Eliezer & le pria d'entrer chez eux. Eliezer y eftant entré, protefta qu'il ne mangeroit ny ne boiroit point avant qu'il eut ter mine l'affaire pour laquelle il eftoit venu. Il leur dit qu'il eftoit le ferviteur d'Abraham: que Dieu avoit

ren

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