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ont mefme une compaffion fecrette: & bien-loin de murmurer contre les riches & de foûhaiter leurs richeffes, ils beniffent leur pauvreté & la regardent comme un excellent moyen de fatisfaire a Dieu pour leurs pechez qu'ils ont toûjours devant leurs yeux, & qu'ils fentent comme le Lazare fentoit fes ulceres. Une pauvreté foufferte en ce monde de cette forte, eft une fource de biens pour l'autre ; & les riches font bien malheureux s'ils ne mettent leur bonheur à secourir ces fortes de pauvres, puifque felon la parole de faint Bernard, les amis des pauvres font les amis des rois, & les pauvres volontaires font rois eux-mefmes.

Le Pharifien & le Publicain. Luc. 18.

La mef

moan

nec. 32.

ESUS-CHRIST ayant marqué d'une maniere fi

étonne encore plus fes difciples en leur reprefentant la furprife où feront tous les hommes lors qu'il viendra juger la terre. Car il compare le temps auquel il

viendra

viendra, à celuy auquel le deluge inonda le monde. "Les hommes alors, dit JESUS-CHRIST, beuvoient & mangeoient ils marioient leurs filles, & époufoient des femmes jufqu'au jour que le deluge arriva qui les enfevelit tous. Pour éviter cette furprife aux approches d'un fi grand mal, JESUS-CHRIST avertit les fidelles de prier fans relâche, & de le faire avec la mefme ardeur qu'une veuve qui eft opprimée va prier un Juge de luy faire juftice, & qui l'importune de telle forte par l'affiduité de fes cris, qu'il eft contraint malgré luy-mefme de ceder à fes inftances & de faire ce qu'elle veut. Mais en nous exhortant à la priere & en nous en donnant un exemple fi parfait dans cette veuve dont il parle, il nous donne dans une mefme parabole un double modelle de deux perfonnes qui prient, pour l'une defquelles il n'a que de l'horreur, & dont l'autre luy eft agreable. Deux hommes, dit-il, allerent au Temple pour prier. L'un eftoit Pharifien, c'eft à dire du nombre de ceux qui faifoient alors profeffion d'une plus grande vertu, & l'autre eftoit Publicain, c'est à dire de ceux qui eftoient les plus odieux alors par leurs déreglemens & par leur avarice. Le Pharifien fe tenant debout rendoit graces à Dieu de ce qu'il n'eftoit pas comme le refte des hommes qui font injuftes & voleurs, ni comme ce Publicain qu'il voyoit auffi dans le Temple. Il reprefenta à Dieu qu'il jeûnoit deux fois la femaine, & qu'il donnoit exactement la dixme de tous les biens. Mais lors qu'il offroit à Dieu ces prieres prefomptueufes, & qu'il ne luy montroit que ce qu'il avoit de fain en luy, le Publicain dans un efprit bien different fe tenoit au bas du Temple, & rougiffant de ce qu'il fentoit dans fon cœur, témoignoit au dehors la confufion du dedans. Il n'ofoit lever les yeux, il frappoit fa poitrine, & n'ouvroit fa bouche que pour dire ces paroles: O Dieu, ayez pitié de moy qui fuis un fi grand pecheur. JESUS-CHRIST nous fait bien voir aprés avoir rapporté cette parabole combien fes penfées font differentes des noitres, & combien fes jugemens font élevez au-dessus de

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ceux des hommes. Les hommes alors n'euffent regardé ce Pharifien qu'avec admiration, & Dieu ne le regarde qu'avec horreur; & au-lieu que ce Publicain eftoit méprifé de tout le monde, JESUS-CHRIST affure que fon humilité l'a rendu jufte devant fes yeux. Car Dieu rejette les fuperbes & aime les humbles; & c'est eftre fuperbe que de se préferer aux autres pour quelque avantage qu'on puiffe avoir au-deffus d'eux. Saint Auguftin remarque que le crime de ce Pharifien n'eftoit pas de s'attribuer les dons de Dieu, puis qu'il luy en rendoit graces; mais de s'élever au-deffus de ceux qui paroifloient n'en avoir pas efté fi favorifez. Les vertus exterieures font dangereufes fi elles ne font jointes en meime-temps avec une grande humilité; & il vaut mieux ne voir en foy que des crimes, & en gemir humblement devant Dieu comme le Publicain, que d'envisager comme le Pharifien un grand nombre de bonnes œuvres qui ne fervent qu'à nous infpirer de la complaisance pour nous-mefmes & du mépris pour les autres.

Ouvriers de la vigne. Matth. 20.

E Fils de Dieu voulant donner à ses difciples une

nee 32. fuite de tous les fiècles, leur dit cette parabole : Le

royaume des cieux eft femblable à un pere de famille qui fort de grand matin & qui va louer des gens pour travailler à la vigne, aprés avoir fait marché avec eux de ce qu'il leur donneroit pour leur journée. Eftant encore forty vers les neuf heures il vit quelques perfonnes dans la place de la ville qui ne faifoient rien, aufquels il dit: Allez travailler à ma Vigne, je vous donneray ce qui fera jufte, & ils y allerent. Il fit encore la mefme chofe fur le midy, & fur les trois heures du foir. Mais eftant encore forti fur la fin du jour, il en vit qui estoient oififs, & il leur demanda pourquoy ils paffoient ainfi tout le jour fans rien faire. Ils Tuy répondirent que perfonne ne les avoit employez.

Il les envoya encore à fa vigne comme les autres, leur promettant de leur donner ce qui feroit jufte. Le foir eftant venu, le pere de famille commanda à celuy qui avoit foin de fes affaires, d'appeller fes ouvriers pour leur donner à tous leur recompenfe, en commençant neanmoins par les derniers. Ceux donc qui n'eftoient venus que le foir, furent appellez les premiers, & ils receurent tous le prix dont le pere de famille eftoit convenu avec les autres. Ce que voyant ceux qui avoient efté appellez à la pointe du jour, ils crûrent que comme ils avoient plus travaillé que ces derniers, ils recevoirent auffi davantage. Mais ils ne receurent que ce dont ils eftoient convenus. Et en le recevant ils murmurerent contro le pere de famille. Ces derniers venus, difoient-ils, n'ont travaillé qu'une feule heure, & cependant vous les égalez à nous qui avons porté le poids du jour & de la chaleur. Le pere de famille répondant à l'un d'eux, luy dit: Mon ami, je ne vous fais point de tort. N'eftes-vous pas convenu avec moy de vostre recompenfe? Prenez ce qui eft à vous & vous retirez.

La mel me an

Je veux donner à ce dernier autant qu'à vous. Ne
m'eft-il pas permis de faire ce qu'il me plaift; ou ef-
tes-vous méchant parce que je fuis bon? C'eft ainfi,
dit JESUS-CHRIST, que les derniers feront les
premiers, & que les premiers feront les derniers. Car
plufieurs font appellez & peu font éleus. Cette para-
bole toute pleine de myfteres a donné lieu aux faints
Peres de l'Eglife d'exhorter les Chreftiens à travailler
fidellement à l'œuvre de leur falut, & à fuir l'oifi-
veté que Dieu témoigne luy eftre fi defagreable. Tous
travaillent à cette vigne, quoy que le travail foit dif-
ferent; & il fuffit d'y faire ce que le pere de famille
nous commande, fans faire des avances de nous-
mefmes, ou choisir le travail qui nous plaift le
plus. Mais il faut bien prendre garde de ne pas s'élever
de ce qu'on fait, & de prétendre d'eftre plus recompen-

que les autres. On perd fon travail lors que l'on
s'y appuye trop, & on confume fes forces en vain
lors qu'on y fonde fes efperances C'est de Dieu feul
& de la bonté que nous devons tout attendre. Quel-
que ouvrage que nous ayons fait pendant nostre vie,
Dieu ne couronnera en nous que fes dons. Malheur,
dit faint Auguftin, à la vie mefme des hommes qui
paroift la plus loüable, fi Dieu l'examine dans la feve-
rité de fa juftice.

E

Refurrection du Lazare. Joan. 11.

temps deftiné pour la mort du Sauveur commençant à s'approcher, il femble qu'il l'avança nec. 32 en quelque forte par la refurrection du Lazare. Ét comme ce fut le plus éclatant de fes miracles, il excita auffi plus d'envie dans l'efprit de fes ennemis. Lors que le Lazare eftoit encore malade en Bethanie, fes fours Marthe & Marie envoyerent vers le Sauveur pour luy en donner avis. JESUS-CHRIST qui aimoit ces deux fœurs & leur frere, fe contenta alors de dire que cette maladie n'eftoit que pour faire éclater davantage la gloire de Dieu. C'eft pourquoy bien loin

de

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