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mit dans le paradis de délices qu'il avoit luy-mefmé planté, & dans lequel eftoit tout ce qui peut eftre dans les arbres ou d'exellent au gouft, ou d'agreable à la veuë. Il y avoit au milieu de ce paradis un arbre appellé l'arbre de vie; & un autre appellé l'arbre de la fcience du bien & du mal. Dieu établissant l'homme dans ce paradis, afin qu'il s'y occupaft, dit l'Ecriture, & qu'il le gardaft, voulut luy donner lieu de luy témoigner fa fidelité, & de faire voir à l'auteur de fon eftre, qu'il aimoit à dépendre de luy comme de fon Souverain, & qu'il reconnoiffoit luy estre redevable de tout ce qu'il poffedoit. C'est pourquoy il luy fit un commandement tres-jufte en foy & tres-facile à executer. Mangez, luy dit-il, de tous les arbres que vous voyez dans ce paradis; mais ne touchez pas à l'arbre de la fcience du bien & du mal. Car au mefme moment que vous y toucherez, vous mourrez de mort. Il fit enfuite venir devant Adam tous les animaux qu'il avoit creez, afin qu'il leur donnaft leurs noms: ce qu'Adam fit en les nommant chacun d'un nom qui marquoit la nature & les proprietez de ces beftes. Mais comme Adam eftoit feul & qu'il n'avoit point de compagnie qui luy fuft proportionnée, Dieu luy envoya un fommeil divin que I'Ecriture nomme de nom d'extafe; & pendant qu'il dormoit, il tira une de ses coftes & mit de la chair en fa place. Dieu ayant formé la femme de cette cofte qu'il avoit tirée d'Adam, il la luy amena enfuite. Adam la voyant dit que c'eftoit l'os de fes os & la chair de fa chair; & que dans la fuite de tous les fiecles l'homme quitteroit fon pere & fa mere pour s'attacher à fa femme, & que deux ne feroient plus qu'une feule chair. Dieu marqua fenfiblement dans le premier Adam ce qui devoit arriver long-temps aprés dans le fecond; & les Saints Peres nous ont dit que ce fommeil d'Adam eftoit la figure de J. C. dormant fur la croix. Car ce fut alors que l'Eglife fut formée par JE S U SCHRIST; & l'eau & le fang qui fortirent de fon cofté ouvert, furent la fource d'où découlerent tous nos facremens. Le divin Epoux quittant en quelque forte

fon

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fon Fere dans le ciel vint fur la terre pour se lier eter-
nellement à fon époufe; & nous ayant rendu dignes
de luy eftre affociez par un mariage ineffable, il dit
maintenant tres-veritablement de fon Eglife comme
Adam dit d'Eve: Voilà la chair de ma chair, & les os
de mes os.

Cheute d'Adam. Genef. 3.

Ors qu'Adam & Eve commençoient à jouir des Avant

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be par fon orgueil, & qui ne pouvoit fouffrir la fide- ans. lité de ces deux innocentes creatures qu'il voyoit plus foûmifes à Dieu dans un corps tiré de la terre, qu'il ne l'avoit efté dans le ciel & dans l'excellence de fa nature fpirituelle, refolut de les attaquer, & de perdre dans la tige tous les hommes qui naiftroient d'eux. Il fe fervit pour ce fujet du ferpent le plus fin de tous les animaux; & croyant qu'il furmonteroit

plus

plus facilement la femme, il s'adreffa d'abord à elle & luy dit: Pourquoy Dieu ne vous a-t-il pas permis de manger indifferemment de tous les fruits de ce jardin? Eve au lieu de rejetter cette voix empoifonnée, & de ne pas mefme l'écouter pour témoigner à Dieu combien elle luy eftoit fidelle, répondit à ce feducteur & luy dit: Nous avons la liberté de manger de tous les arbres de ce lieu, mais Dieu nous a défendu de toucher au fruit de cet arbre, de peur que nous ne mourions. Le Demon ayant ainsi trouvé entrée dans cet efprit, ofa l'affurer contre la - parole formelle de Dieu que cela ne feroit pas. 1leut mefme la hardieffe d'attribuer cette défence de Dieu à une baffe jaloufie. Dieu fçait, dit-il, qu'au mefme jour que vous mangerez de ce fruit, vos yeux feront ouverts, & que vous ferez comme des Dieux. Eve fe laiffa feduire par ces promeffes artificieuses; & commençant de tomber déja dans le cœur, elle acheva tout-à-fait de fe perdre en s'arrestant trop à confiderer ce fruit. Car au lieu d'en retirer fes yeux comme d'une chofe qui luy eftoit interdite, elle vit au contraire avec plaifir qu'il eftoit agreable à la veuë: & ne doutant point qu'il ne fuft auffi tres-delicieux au gouft, elle y porta la main,elle en prit & en mangea. Ce fut ainfi que felon l'Ecriture, le peché entra dans le monde par une femme. Car aprés avoir mangé de ce fruit elle en donna à Adam, qui ne fut point feduit par les efperances du Demon, mais qui fe laiffa emporter à une molle complaifance, & n'eut pas la mefme force dans le paradis, comme remarquent les faint Peres, que Job eut depuis fur fon fumier, puis qu'Adam aima mieux ne pas caufer de la douleur à fa femme par un refus, que de luy refifter pour demeurer attaché à la loy de Dieu. Ce fut là la chûte qui a eu depuis & qui aura jufqu'à la fin du monde de fi effroyables fuites. Ce fut la ce peché que les Saints appellent ineffable dans fa grandeur, qui faifant mourir tous les enfans dans le pere, fait que nous fommes dévouez à la mort & au Demon, avant mefme que de naiftre: puifque le Demon ayant rendu Adam fon efclave, a un droit

legitime fur tous les enfans qui fortent de luy. Cette playe profonde nous montre que nous ne pouvons affez admirer la grace de celuy qui l'eft venu reparer, Le reffentiment continuel que nous en devons avoir, nous doit faire rejetter avec horreur les tentations du Demon, qui ne pouvant oublier fes premiers artifices qui luy ont fi bien réüffi; tasche encore tous les jours de nous perfuader en mille manieres que nous pouvons faire innocemment ce que Dieu mefme nous à défendu. Mais comme Eve a reconnu que les menaces de Dieu eftoient vrayes, & les promeffes du Demon fauffes, nous devons de mefme reconnoistre que les menaces, que Dieu nous fait encore aujourd'huy, font tres-veritables, & que les fauffes interpretations dont le Demon les colore pour les éluder, ne font que de vains artifices par lefquels il tasche de furprendre les enfans comme il a furpris le pere.

A

Punition d'Adam. Genef. 3.

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Dam & Eve eftant tombez d'une cheute fi funef- Avant te, commencerent à fentir le premier effet deJ. C. Teur faute en voyant qu'ils eftoient nuds. Leur nudité ans. ne leur paroiffoit pas auparavant dans leur innocence, parce qu'ils eftoient purs alors comme des Anges, & que leur corps eftoit parfaitement foûmis à l'efprit. C'est pourquoy ils commencerent à rougir auffitoft aprés leur cheute, & pour fe couvrir ils prirent des feuilles de figuier. Ayant enfuite entendu la voix de Dieu qui fe promenoit dans le paradis, au lieu d'en eftre ravis de joye, comme ils avoient fait jufques alors, ils s'enfuirent de devant luy & fe cacherent. Dieu appella Adam & luy demanda où il eftoit. Il luy répondit, Qu'il craignoit de paroiftre devant luy à caufe de fa nudité. Et Dieu luy ayant reproché fa desobeïffance qui feule luy avoit fait connoiftre qu'il eftoit nud, il s'excufa cruellement en accufant fa femme, & en difant que c'eftoit elle qui luy avoit donné ce fruit. Dieu demanda à la femme pourquoy elle

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avoit fait cela. La femme s'excufa de mefme fur le ferpent. Mais Dieu ne recevant point d'excufe dans un fi formel violement de fa loy, maudit d'abord le ferpent qui avoit eftê le premier auteur de ce mal, le t condamna à ramper fur fon ventre & à manger la terre, & luy prédit que comme il avoit feduit la femme, la femme un jour luy écraferoit la tefte. Il prononça enfuite l'arreft à ces deux coupables. Il condamna chacun d'eux à des peines qui ne s'éprouvent que trop veritables encore aujourd'huy. Il dit à la femme qu'il multiplieroit fes peines, qu'elle enfanteroit avec douleur,& qu'elle feroit affujettie à l'homme. Il dit à Adam que puis qu'il avoit préferé la voix de fa femme à la voix de Dieu, la terre feroit maudite, qu'elle luy produiroit des épines & des ronces, & qu'il mangeroit fon pain à la fueur de fon vifage, jufqu'à ce qu'il retournaft dans la terre dont il avoit efté tiré. Il leur donna enfuite des habits de peaux de beftes, & ajoûtant la raillerie & l'infulte à ces juftes chaftimens il dit: Enfin Adam eft devenu comme un

de

Va

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