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du M.

J.C.

quel.

foin de toute fa maifon. Lors que Jofeph jouiffoit de ce bonheur, la femme de Putiphar troubla ce repos par une paffion déteftable. Ayant fouvent jetté les Enviyeux fur Jofeph, elle conceut pour luy une affection ron impudique; qui du fecret du cœur paffa-bien-toft aux An paroles, des paroles aux follicitations preffantes, & 2286. enfin dans une violence toute ouverte. Car trouvant Avant toûjours Jofeph inébranlable, parce qu'il avoit trop 118. de crainte de Dieu & trop de refpect pour fon maif- yoleph tre; cette femme enfin ne pouvant vaincre fa paffion, ayans ny s'inftruire elle-mefme par la modeftie d'un efcla- ques ve, l'ayant trouvé un jour feul dans fa maifon, elle le 27. ans. prit par fes habits & le voulut contraindre de faire ce qu'il avoit toûjours refufé avec tant de conftance. Jofeph dans un peril fi preffant laiffa fon manteau entre les mains de cette femme, & s'enfuit. Cette Egyptienne irritée par ce refus, changea fon affection en une haine pleine de rage. Elle fit auffi-toft un grand bruit dans le logis, comme fi Joseph l'euft follicitée à commettre un crime; & tenant en main ce manteau qui D 6

luy

Torn.

luy reprochoit fon impureté, & qui la faifoit rougir en elle-mefme, elle s'en fervit au contraire comme d'une preuve de fa fidelité à fon mary. La credulité de Putiphar le rendit injufte & cruel. Il entra dans une grande colere contre Jofeph, & il le fit mettre dans la prifon royale, où fut il gardé tres-etroitement. Ainfi, dit faint Ambroife, on écoute la voix de la calomnie, & on impofe filence à la verité. C'est une femme qui parle, & qui parle fans témoin. Elle voit que la conduite fi pure de Jofeph eft la condamnation de la fienne. Elle entreprend de le facrifier à fa vengeance, & de punir en luy la chafteté aprés l'avoir foulée aux pieds dans elle-mefme. C'eft ainfi, ajoûte ce Saint, en marquant le temps des Ariens, que les prifons font devenues quelquefois le partage des innocens, & que ceux qui s'efforçoient de corrompre la foy & la verité, ont mis dans les fers ceux qui n'avoient pas voulu en eftre les adulteres. Que les juftes neanmoins, continue ce faint Docteur, ne fe troublent point. Dieu defcend avec les fiens dans les cachots, ainfi qu'il eft dit de ce Patriarche, & ïl ne les abondonne point dans leurs liens. Comme c'eftoit alors le temps où Dieu faifoit paroiftre fa toute-puiffance par des jugemens vifibles, il fe fervit en cette rencontre de la haine de cette femme, pour rendre Jofeph maiftre de toute l'Egypte. Mais dans le temps de la loy nouvelle aprés l'exemple de JESUS-CHRIST & des Martyrs, les juftes qui font traitez comme ce Saint, n'aiment que fa patience & non la grandeur qui l'a fuivie; & dans cette affliction qui leur arrive tout ensemble de la part de Dieu & des hommes, ils ne confiderent que Dieu feul & non les hommes. Ils fçavent qu'ils font coupables devant luy quoy qu'ils ne le foient pas des chofes dont on les accufe; & ils beniffent fa main qui les guerit lors qu'elle les frappe. Non feulement ils n'ont pas non plus que Jofeph le moindre reffentiment contre ceux qui pourroient avoir contribué quelque chofe à cet eftat où ils fe trouvent; mais ils fe croyent au contraire encore plus obligez de les aimer. Ils comptent les jours de leur affliction entre les jours

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jours les plus heureux de leur vie; & lors qu'ils font
perfuadez qu'ils ne doivent attendre leur liberté qu'à
la mort, ils difent comme Job: J'ay dans le ciel ce-
luy qui eft le témoin & le juge de mon cœur ; & c'eft
de luy feul que j'attens la juftification de mon inno-
cence & la recompenfe de ce que je fouffre.

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J

Ofeph eftant dans la prifon fit voir par les graces qu'il y receut, que ces lieux qui font quelquefois inacceffibles aux hommes, nele font pas aux mifericordes de Dieu; & que plus on s'eft expofé pour luy demeurer fidelle, plus on reçoit de luy des marques de fa bonté. Il y fit paroiftre tant de vertu & tant de fageffe, que le commandant de ce lieu luy An du donna autorité fur tous les autres prifonniers, & qu'il M.2287 ne fe faifoit rien que par fes ordres. Lors que les chofes eftoient en cet eftat, deux officiers du Roy Pha

- D 7

raon,

Avant

J. C.

1717.

raon, l'un grand Echanfon, & l'autre fon grand Pannetier, l'ayant offenfé, & eftant mis en prifon fous la conduite de Jofeph; ils eurent chacun un fonge qui leur prefagea l'avenir. L'Echanfon crut voir une vigne porter des fleurs & en fuite des raifins qu'il preffa dans la couppe de Pharaon pour luy prefenter à boire. Le grand Pannetier crut avoir trois corbeilles de farine fur fa tefte, & qu'en portant dans celle d'enhaut toutes fortes d'ouvrages faits de pafte, les oifeaux venoient les becqueter. Jofeph alors figurant JE SU SCHRIST dans le difcernement qu'il fit de ces deux compagnons de fes peines, dit au Pannetier que dans trois jours il feroit pendu, & à l'Echanfon que dans trois jours Pharaon le reftabliroit. 11 le pria de fe fouvenir de luy. Mais l'Echanfon l'oublia tout-à-fait dans fon bonheur, jufqu'à ce que deux ans aprés, un fonge qu'eut Pharaon fit fouvenir cet officier de fon fonge d'autrefois, & de Jofeph qui le luy avoit interpreté. Pharaon vit en fonge fept vaches fort graffes L'an fortir du Nil & paiftre dans des marefts. Il en vit endu M. fuite fept autres fortir du mefme fleuve effroyableAvant ment maigres, qui neanmoins devorerent les fept premieres. Eftant rendormi il vit encore fept épics Jofeph parfaitement beaux, qui furent devorez par fept au

2289.

J.C.

1715.

ayant

tres qui eftoient fort maigres. Perfonne donc ne pou30. ans. vant interpreter ce fonge, cet officier parla de Jofeph au Roy, qui commanda auffi-toft qu'on l'amenaft devant luy. Jofeph ayant ouy ces fonges dit au Roy qu'ils marquoient qu'il alloit venir fept années d'une grande fertilité, & qu'elles feroient fuivies aprés d'une épouvantable famine. Et pour la prévenir il luy confeilla de faire de forts grands greniers & d'y amaffer tout le blé qui fe pourroit dans ces premieres années, afin de s'en fervir dans les annees de la famine. Pharaon admira la fageffe de ce jeune homme, & il crut qu'il n'y avoit perfonne plus capable que luy d'accomplir un fi grand deffein. Il luy donna donc une plaine autorité fur toute l'Egypte, le fit monter fur fon char, & il commanda qu'un heraut marchaft devant luy pour obliger tout le monde à

flechir

fléchir le genou devant Jofeph, qu'il appella le Sauveur du monde. C'eft ainfi que ce faint homme commença d'entrer en fa gloire, & de fortir d'un eftat où Dieu l'avoit mis d'abord pour fervir de fondement à la grandeur où il le vouloit elever, Il ne s'éblouit point dans ce paffage fi furprenant; & comme fes humiliations ne l'avoient point abbatu, fa gloire auffi ne l'éleva pas. Il receut également les biens & les maux de la main de Dieu, & confervant dans fon cœur une moderation toûjours uniforme; il ne penfa point dans fa grande puiffance à fe vanger de ceux qui l'avoient fi injustement deshonoré par leurs calomnies, & qui n'eftoient que trop punis par le feul fouvenir de leur crime, fans avoir befoin d'autre fupplice que de celuy de leur defefpoir & de leurs remords. Ĉes changemens fe font faits fenfiblement fur la terre quand Dieu l'a voulu, mais ils fe font invifiblement tous les jours par un miracle fans comparaison plus grand, dont l'élevation de Jofeph n'a efté que la figure, lors que ceux qui ont efté comme foulez aux pieds des hommes, & deshonorez par les prifons & par les calomnies, paffent tout d'un coup de ces peines qui n'ont duré qu'un moment, à cette éternité de gloire que leurs fouffrances leur ont acquife.

J

Freres de Jofeph. Genef. 42.

Ofeph ayant receu du Roy Pharaon une fi gran-
de puiffance, & eftant le dépofitaire de fon auto-
rité royale, fit voir à ce Prince combien un Roy

eft heureux lors qu'il a un fage Miniftre,& qu'un bon confeil eft préferable à tous les trefors. Il appliqua d'abord fes foins au bonheur des peuples, & procura une fertilé pour le temps de l'indigence, fans caufer l'indigence au milieu de la fertilé. Lorsqu'il eut ramaffé avec foin le blé des fept premieres années, & l'An que les commencemens de la famine preffoient déja 2296. les hommes, le peuple ayant recours dans fa mifere Avant à Pharaon, comme à celuy qui devoit pourvoir à

leurs

du M.

1708.

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