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toutes fes fervantes. Dés qu'elle apperceut cette corbeille de joncs, fa curiofité voulut auffi-toft s'inftruire de ce que c'eftoit, & elle envoya une defes filles pour l'apporter. Quand elle eut veu ce petit qui crioit dans le berceau, elle en eut compaffion; & la beauté de l'enfant augmentant encor fa tendreffe, elle refolut de le fauver. La foeur de l'enfant qui voyoit ce qui fe paffoit s'approcha, & pria la fille de Pharaon d'agréer qu'elle allaft chercher une femme des Hebreux pour fervir de nourrice à ce petit. Elle fit promtement venir fa mere mefme, à qui la fille de Pharaon commanda de nourrir cet enfant, & luy en promit bonne recompenfe. Lors qu'il fut grand, Lingue fa mere l'alla porter à la fille de Pharaon qui l'adoEGYP pta & qui le confidera toûjours comme fon fils proEgnifie pre, luy donnant le nom de Moyfe, parce qu'elle Pau. l'avoit fauvé des eaux. Les faints Peres ont admiré

Moi en

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comment ce faint homme qui eftoit le miniftre de l'ancienne loy, comme JEsu S-CHRIST aefté le difpenfateur de la loy nouvelle, fut fa figure mefme dés fa naiffance en fe fauvant fi diviniment du carnage de tant d'enfans. Dieu fit voir bien fenfiblement dans ces rencontres qu'il eft le maistre des hommes & des plus puiffans d'entre les hommes, & que toutes leurs refolutions font vaines lors qu'elles font contraires à fes deffeins eternels. Il femble qu'il s'oppofe avec plus d'éclat & avec plus de force à ceux qui l'attaquent par une guerre plus ouverte ; & on ne peut affez s'eftonner icy comment fa fageffe fe jouë du Roy Pharaon, qui veut exterminer tous les enfans des Hebreux, & qui malgré luy éleve dans fon palais & careffe comme fon petit file, celuy qui devoit retirer d'entre les mains des Egyptiens le peuple qu'il perfecutoit. Sa mere qui l'avoit abandonné par crainte en repend le foin, & on luy paye un fervice qu'elle eut voulu acheter de tout l'or du monde. Ce fut l'expofition mefme de cet enfant qui fut le principe de fon agrandiffement, & Dieu le fauve icy des eaux d'un fleuve, afin de faire un jour submerger à fon commandement au milieu des eaux de la

mer

mer le fils du Prince qui l'avoit voulu faire perir de la mefme mort, & qui eut pour compagnons de fon fupplice, les principaux de fes fujets qu'il avoit rendus les executeurs de fes ordres fi barbares. Aprés cela il faut avoir bien peu de foy & de fens, fi la veuë de ces merveilles ne nous force à reconnoiftre que Dieu eft tout, que les hommes quelque puiffans qu'ils paroiffent ne font rien, & qu'on ne fçait fi on doit admirer davantage ou l'impieté ou l'extravagance de ceux qui ofent combattre contre Dieu mefme.

Buiffon ardent, Exod. 3.

M

du M.

2473.

Avant

Oife ayant efte fauvé des eaux d'une maniere L' miraculeufe, & eftant élevé dans la maifon de Pharaon, fit bien voir lors qu'il fut plus âgé que Dieu l'appelloit à autre chofe qu'à une grandeur temporel-J.C. Le. Car voyant l'affliction des Ifraelites pendant qu'il 1514 ftoit dans toute forte de profperitez, la foy ne put

E 2

fouf

ayant

alors 40 ans

Moyfe fouffrir ce difcernement. Il aima mieux, comme dit faint Paul, eftre affligé avec le peuple de Dieu, que d'eftre heureux avec ceux qui s'en declaroient les ennemis. Il penfa donc à quitter le palais du Roy pour aller trouver les freres; & ayant veu un Egyptien qui outrageoit un Hebreu, il fut faifi de l'Efprit de Dieu, & tua cet Egyptien, qu'il cacha dans le fable, croyant que cette action de zele n'avoit efté veuë de perfonne. Le lendemain il vit deux Hebreux qui fe querelleient, & comme il tâchoit de les accorder en leur reprefentant qu'ils eftoient freres; l'un d'eux luy demanda s'il venoit pour le tuer comme il avoit tué un Egyptien le jour precedent. Cette parole obligea Moïfe de s'enfuir au païs de Madian, où lors qu'il eftoit auprés d'une fontaine fept filles du preftre de Madian nommé Raguel, autrement Jethro, vinrent y abreuver leurs troupeaux. Mais d'autres pafteurs repouffant ces filles avec violence, Moïfe les défendit de telle forte, que leur pere en eftant averti voulut voir cet Egyptien qui les avoit fi charitablement secouruës. Moife vit la bonté de cet homme, il confentit de demeurer avec luy, & ayant pris fa fille Sephora pour femme, paffa quarante ans à paiftre les brebis de fon An beaupere dans le defert. Un jour comme il eut mené du M. fon troupeau dans le lieu le plus retiré vers la montaAvant gne d'Horeb, Dieu luy apparut au milieu d'un buiffon ardent qui ne fe confumoit pas. Il voulut voir de plus Moyfe prés cette merveille; mais Dieu l'arrefta, & luy défenayant dit d'approcher. Il luy dit enfuite qu'il avoit ouy les cris des Hebreux qu'il avoit enfin refolu de les délivrer de la tyrannie de l'Egypte, & que ce feroit luy dont il fe feviroit pour cet ouvrage. Moïfe s'en excufa d'abord. Mais Dieu le luy commanda de nouveau ; & pour l'y engager plus facilement. il luy fit faire fur l'heure deux miracles. Il changea fa verge en ferpent, & de ferpent il la changea en verge; il rendit aufli fa main lepreufe lors qu'il la mit dans fon fein, & il la guerit en fuite. Moife ne laiffa pas neanmoins de refiiter toûjours à Dieu jufqu'à le mettre en colere; mais enfin il fut obligé de ceder. Il prit congé de Jethro

1513.

J.C.

1591.

alors

80, ans.

fon

fon beaupere, & s'en alla dans l'Egypte trouver fon peuple pour le confoler. Les Saints ont regardé ce miracle du buiffon qui brûle fans fe confumer, comme la figure de ce qui arrive aux veritables élûs qui font affligez dans le monde comme les Ifraëlites l'estoient alors par l'ordre de Pharaon, mais qui ne font point confumez de ces flames qui les environnent de toutes parts, parce qu'ils ont Dieu au milieu d'eux, qui empefche que ce feu ne les confume & qui fait par fa grace qu'il ne ferve qu'à les rendre plus purs & plus eclatans. Saint Gregoire auffi a toûjours confideré la vocation de Moife comme une figure de celle des veritables pafteurs. Moïfe, dit-il, a donné un grand exemple à tous les pafteurs, en réfufant d'abord avec quelque forte d'opiniaftreté de s'engager à conduire le peuple de Dieu, quoy que Dieu mefme le luy commandaft & qu'il fe fuft difpofé à un employ fi difficile par quarante années de retraite & de penitence. Que ceux-là donc, ajoûte-t-il, qui font affez temeraires, non feulement pour ne craindre pas, mais mef me pour defirer de commander aux autres, confiderent combien ils font coupables, puis que les plus grands Saints ont apprehendé de s'engager à conduire le peuple de Dieu, lors que les plus foibles & les moins vertueux foûpirent aprés cette charge. Ils ne peuvent répondre feulement de leur ame, & ils veulent bien fe rendre refponfables de celles de tout un peuple.

Moyfe devant Pharaon. Exod. 5.

Haraon ayant oüy les premieres propofitions que La me

2513.

fon peuple pour luy aller facrifier dans le defert, il fe nee. mocqua de cette priere. Il dit qu'il ne connoiffoit point le Seigneur. Il attribua à un efprit de revolte un ordre fi formel de Dieu, & il en témoigna fon mécontentement à Moyfe, qu'il traita comme un feditieux. Il commanda qu'on redoublast les violences envers le peuple, & qu'on le contraignift de rendre

le mefme nombre de briques fans luy fournir les pailles comme à l'ordinaire. Ce peuple fe voyant dans ce renouvellement de maux, vint s'en plaindre à Moyfe & à Aaron comme eftant la caufe de cette perfecution nouvelle, & ils figurerent admirablement alors les murmures qui s'exciteroient dans la fuite de l'Eglife contre les vrais pafteurs des ames, lors qu'ils entreprendroient de les convertir & de les faire fortir de l'Egypte. Dieu fut touché de ce traitement de fon peuple; & comme l'affliction eft elle feule une voix qui s'éleve jufqu'à fon thrône, il envoya de nouveau Moyfe vers Pharaon pour luy commander de laiffer aller fon peuple. Moyfe obeit à Dieu, & pour donner à ce Prince une preuve de fa miffion, il changea en fa prefence la verge d'Aaron en ferpent. Mais Pharaon avoit auffi fes enchanteurs qui imiterent par la force de leur magie les veritables miracles de Dieu, pour en ofter le credit; & ils changerent en effet leurs verges en ferpens en prefence de Pharaon. Ce Prince donc ne s'eftant point rendu à ce miracle, Dieu commanda à Moyfe

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