AVERTISSEMENT. L n'y a rien de plus établi pár le confentement de tous les Saints Peres, que le respect que les Chreftiens doivent avoir pour la parole de Dieu, & le foin avec lequel ils y doivent chercher les regles de leur falut. Et comme ces Saints connoiffoient parfaitement la profondeur de l'Ecriture, qui eft pleine de mysteres, voilez fous des figures & des paraboles, ils ont fait quelque diftinction entre ces ouvrages fi divins, qui ne font pas tous également intelligibles,quoy qu'ils ayent tous une égale fainteté. Ainfi ils ont crû que les livres d'hiftoire qui nous representent les vies des Patriarches & de ces admirables Saints qui ont eu une charité apoftolique tant de fiecles avant les Apoftres, eftoient extrémement propres à reveiller noftre pieté, & à nous inftruire par des exemples proportionnez à la lumiere des moindres fidelles. C'eft dans cette veuë que faint Bafile a dit que l'Ecriture décrivant la vie de ces premiers Saints, nous propofe autant de tableaux vivans & animez pour eftre la regle de la noftre. Saint Chryfoftome dans le mefme efprit voulant apprendre à fon peuple la maniere de vivre chreftien nement, nement, luy explique dans des Sermons toute la Genese. Et faint Ambroife a fait de mefme d'excellens Traitez fur la vie des principaux Patriarches, pour faire rougir les Chrétiens d'eftre moins les imitateurs de JESUS-CHRIST lors qu'ils voyent fa vie & fa mort fi divinement décrites dans fon Evangile, que ne l'ont efté ceux qui ont vécu tant de fiecles avant luy, lors que toute la terre eftoit couverte des tenebres de l'impieté & de l'idolatrie. C'eft donc à l'imitation de ces faints Docteurs, qu'on propofe encore icy la vie de ces mefmes Saints qu'ils ont relevez avec tant d'éloges,& qu'on a fait ce Recueil de toute l'Hiftoire de l'Ancien & du Nouveau Teftament. On les represente en abregé, mais de telle forte neanmoins, qu'on a tâché de marquer affez au long tout ce qui eft plus propre pour toucher les ames, & pour leur infpirer la pieté. Et afin de fe proportionner davantage à tout le monde, & de rendre ces inftructions d'autant plus utiles qu'elles feront meflées de quelque agrément, on fait voir dans des ima-ges toutes ces hiftoires faintes avec des dif cours où elles font exprimées; & on met à la fin de chacun les explications que les Saints Peres y donnent, qui contiennent d'excellentes inftructions pour les Chreftiens en quelque eftat & dans quelque condition qu'ils puiffent eftre. Il ne fera pas difficile d'en reconnoiftrè l'utilité, fi on s'applique un peu à cette lecture. On y trouvera des exemples admirables pour les Rois & les Princes; pour ceux qui conduifent les Eftats; pour les Miniftres de l'Eglife; pour les Vierges confacrées à Dieu; & enfin pour tous ceux qui veulent viure chreftiennement dans le monde & le mariage, auec lef quels la vie des Saints de l'Ancien Teftament a d'autant plus de proportion qu'on ne connoiffoit alors que la chafteté du mariage, & celle des veuves; la gloire de la virginité ayant efté refervée pour la loy nouvelle. C'est pourquoy faint Gregoire Pape dit qu'on peut voir dans les Patriarches de parfaits modelles de toute vertu. Abel, dit-il, nous enfeigne l'innocence; Enoch la pureté du cœur; Noé la perfeverance dans la juftice; Abraham la perfection de l'obcïffance; Ifaac la chafteté dans le mariage; Jacob la conftance dans les travaux; Jofeph l'oubli des injures; Moïfe la douceur envers les perfonnes les plus rebelles; & enfin Job une patience invincible dans le comble de l'affliction. Lors qu'on lit l'Ecriture feule il n'est pas fi aifé à tout le monde de tirer des inftructions édifiantes de ces hiftoires fi faintes. Mais on les verra icy fans peine appliquées à chaque hiftoire, & tirées avec quelque foin des ouvrages des principaux Docteurs de l'Eglife. On avoit penfé d'abord à mettre les pro pres pres paroles des Saints imprimées en autre lettre: mais fouvent leurs paffages eftoient trop longs pour tenir dans le petit efpace qui reftoit aprés la reprefentation de chaque hiftoire, & ils n'auroient plus eu cette breveté vive & animée qui paroiffoit fi neceffaire à des reflexions qu'on veut joindre à un discours historique. On a donc efté obligé de les abreger. On exprime neanmoins leurs termes effentiels, & on marque exactement leurs penfées & leurs fens, quoy qu'on ne garde pas toujours le nombre de leurs paroles. Ces reflexions des faints Docteurs de l'Eglife fur les exemples & les paroles de l'Ecriture,font d'autant plus importantes, qu'ils nous apprennent eux-mefmes que c'est dans ces occafions qu'ils fc font crûs obligez de découvrir & d'expliquer avec plus de force les plus grandes veritez. C'eft ce qui a fait dire à faint Auguftin cette parole remarquable: Quand << nous fommes parmy vous, dit-il à fon peuple, "< nous vous fouffrons pluftoft que nous ne❝< vous inftruifons. Mais quand nous fommes " dans ce lieu faint,& que nous vous expliquons" les livres de Dieu, fi les veritez que nous vous " propofons vous paroiffent fortes,il faut que la " neceffité d'interpreter l'Ecriture excufe au“ moins la liberté avec laquelle nous vous re-“ prefentons ce que Dieu vous dit. Si la parole" de Dieu vous étonne,elle m'étonne auffi. J'en-" A 6 tens «tens fes menaces comme vous, & en vous di "fant ce qui vous fait trembler,je tremble moy<< mefme. On remarquera peut-eftre dans la fuite de ceLivre que quelques-unes de ces figures auroient pû fe faire avec plus de choix, qu'on n'y a pas reprefenté quelques hiftoires qui paroiffent auffi importantes que celles qu'on y a mifes. Mais cela ne nuit pas au corps de l'ou-vrage & à la fuite de ces difcours, parce qu'on les a liez ensemble autant qu'on a pû fans avoir égard aux figures, & qu'on y remarque fouvent des chofes importantes qui n'ont pas esté reprefentées dans les images. Ileft arrivé auffi quelquefois qu'en voulant marquer une action qui eft décrite affez au long dans l'Ecriture, on en a omis quelques circonftances qui font tres-confiderables en elles-mefmes. Mais il eft bon de fe fouvenir que ce Recueil eft un abregé dans lequel on paffe neceffairement beaucoup de chofes; qu'on eftoit mefme borné à cause des figures à un certain efpace, quia obligé quelquefois à retrancher des chofes qu'on avoit marquées dans ces difcours; & que dans le choix qu'on a fait de ce qu'on avoit à dire, on a cru fe de-voir étendre davantage fur les circonftances de l'Ecriture aufquelles les Saints ont attaché leurs reflexions pleines d'édification, qui eftoit une des principales fins de cet ouvrage. One |