nel indéfini s'écrivent de la même manière, hom ou om. En allemand, man fait également les deux fonctions. Aujourd'hui l'on distingue par l'orthographe le substantif du pronom: Mann, l'homme, man, on; autrefois l'un et l'autre s'écrivoient de même, man. Cet usage est fort ancien; on le trouve établi chez les auteurs du neuvième siècle; mais je ne saurois citer aucun exemple plus authentique, et, pour ainsi dire, plus illustre que celui qui est contenu dans le serment de 842. Je mettrai les deux phrases correspondantes en regard: Si cum oм per dreit son fradra salvar dift. .... scal. So so 'Au reste, je pense que la formule théotisque de ce serment est l'original, et la formule romane la traduction; mais je n'entreprendrois pas de le prouver, puisqu'un tel aperçu ne peut se fonder que sur des nuances fugitives. 21 Voyez Scherzii Glossarium Germanicum medii ævi, ed. Oberlin. s. v. WERRA; et Schilteri Thesaur. Antiquit. Teutonic. T. III, in Glossario s. v. WERRUN. En général, la lettre w au commencement des mots théotisques, dans les langues romanes, s'est transformée en Gu ou en G. Ainsi, l'on a fait guerra de WERRA, comme des noms propres WALTHAR, WIDO, en italien Gualtieri, Guido, en françois Gauthier, Gui, etc. Il y avoit, comme de raison, dans les langues germaniques, plusieurs mois pour désigner la guerre: WIG, URLUG; mais WERRA semble avoir prévalu dans les langues mixtes, précisément parce que c'étoit le terme le plus populaire; car WERRA signifioit proprement querelle, rixe. Ce mot a été officiellement employé par Charles-le-Chauve dans ses capitu laires, Tit. XXIII, Cap. 15: Rixas et dissensiones, seu seditiones, quas vulgus WERRAS vocat. WERRA a été confondu mal à propos, par quelqnes étymologistes, avec WERE, qui signifie arme, défense. Ce dernier mot n'a rien à faire avec la dérivation de guerre. 22 Voyez Ihre Glossarium Suio - Gothicum, in Procem., p. xxxvi. « Dum autem verba auxiliaria nomino, facere non « possum, quin, quæ heic disseruntur, iis exemplo propositis, << ulterius confirmem. Alterum horum est avoir, quod a latino « habere ortum esse, nemo ignorat; sed an item j'ai, tu as, «ila? Mirum certe foret, si ab habet non nisi unica litterula << superstes remaneret, dum ceteræ linguæ europeæ hanc vo<< cem pene invariatam servant. Germ. ich habe. Sueth. jag « hafwer. Angl. I have. It. io habbia, etc. Unde vero factum « sit, ut Galli usque adeo devii sint, si quæratur, scire con« venit, apud veteres Westrogothos, eorum in loquendo magistros, duo fuisse verba synonyma, quæ promiscue <«<< usurpantur, haban et aigan, quorum illud Latinorum ha<«< beo, hoc Græcorum exew cognatione attingit: utrumque << vero in orbe gothico pro verbo auxiliari adhibitum fuisse, << sic, ut ab Islandica dialecto exemplum afferam, etc. >> Ihre s'est trompé à l'égard de l'italien, en prenant le subjonctif pour l'indicatif; il a ignoré que, dans l'italien et l'espagnol, le présent de l'indicatif au singulier est tout aussi contracté qu'en françois. Le verbe gothique AIGAN se retrouve en effet dans les autres dialectes de la même famille: en francique EIGON; en anglo-saxon, AGAN. Mais le verbe synonyme HABAN est le seul qui soit resté en usage. Ce dernier, comme on voit, est absolument identique avec le latin. Le présent de ce verbe offre un exemple frappant de l'affinité qui existe entre le latin et les langues germaniques, non seulement à l'égard des racines, mais aussi à l'égard des inflexions. En vertu de cette affinité, plusieurs mots des langues romanes pourroient être aussi naturellement dérivés d'une racine gothique ou francique que d'une racine latine. Par exemple : Ne pourroit-on pas admettre que le souvenir des deux langues mères s'est quelquefois confondu dans l'esprit de ceux qui parloient les nouvelles langues vulgaires? Au moins les mots qui se trouvoient également dans les deux langues, ne devoient pas être exposés à tomber dans l'oubli. La ligne de démarcation est difficile à tracer: dans le doute, je préférerois toujours la dérivation latine. En françois, mourir, mort, viennent de MORI, MORS, MORT-IS; mais meurtre, quoiqu'il soit si rapproché des mots précédens par le sens et par la sition des lettres, vient du gothique MaurThr. compo 23 On nommoit romans indistinctement tous les livres écrits en langue vulgaire. Un poëme sur la passion de la SainteVierge est appelé ainsi : Aquestz romans es acabatz; Nostre senhér en sia lausatz. Chez les Troubadou, romansar signifie chanter, célébrer par des poésies populaires. Gauselms Andreus qu'om románsa, Non trais anc tan greu martire Per la reina de Fransa, Com eu per lei cui desire. M. Raynouard suppose que lingua romana signifie toujours la langue vulgaire ; je pense qu'on a quelquefois employé cette expression pour le latin régulier. Cela n'est pas étonnant, puisque les peuples germaniques appeloient Romains tous les habitans des provinces de l'empire occidental, et que, lors de la conquête, ces habitans parloient latin. Fortunatus loue le roi Charibert de sa parfaite connoissance du latin: Cum sis progenitus clara de gente Sicamber, Floret in eloquio lingua Latina tuo. Qui nos Romano vincis in eloquio! La leçon Romanos, dans le dernier vers, qu'on trouve chez BOUQUET, SCRIPT. RER. FRANC. T. II, est évidemment fausse; mais quand on voudroit la défendre, cela ne changeroit rien à la chose. Je remarque, en passant, que ces vers suffisent pour réfuter les historiens qui prétendent que les rois mérovingiens ont abandonné, tout de suite après Clovis, l'usage de leur langue maternelle. Eginhart dit, dans sa Vie de Charlemagne : « En tibi librum (( præclarissimi et maximi viri memoriam continentem, in <«<quo præter illius facta non est quod admireris, nisi forte << quod homo barbarus, et romana locutione perparum exer<«< citatus, aliquid me decenter aut commode latine scribere << posse putaverim. » Ici romana locutio signifie, sans contredit, le latin régulier; car la connoissance de la langue romane n'auroit pu avancer Eginhart en rien pour la correction du style latin. M. Raynouard (Recherches sur l'ancienneté de la L. R., p. 18) fait sur ce passage l'observation suivante: «< Si << Eginhard, secrétaire et chancelier de Charlemagne, mani<< feste des craintes sur son style latin, s'il se nomme harbare, << c'est que la langue latine n'étant point parlée vulgairement « à la cour, il n'avoit pas la certitude que son style fût << exempt de fautes. En effet, la langue francique étoit la << langue vulgaire à Aix-la-Chapelle et dans le nord de l'em« pire, tandis qu'à Paris et dans le midi de l'empire la langue << vulgaire c'étoit l'idiome roman. » Je ne saurois être d'accord avec M. Raynouard sur cette explication. En se nommant homo barbarus, Eginhart ne veut dire autre chose, sinon qu'il étoit Franc et non pas Romain. Sans doute à Aix-la-Chapelle il n'y avoit qu'une seule langue vulgaire, le francique; mais je crois pouvoir prouver que, dans la partie latine de l'empire de Charlemagne, il existoit deux langues vulgaires, l'une |