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excepté le françois, ont conservé le nominatif singulier des féminins en ▲ : l'italien forme le pluriel de ces mêmes féminins et des noms de la seconde déclinaison, du nominatif latin : le rose, de ROSE'; i venti, de VENTI, etc.; l'espagnol, au contraire, a conservé l'accusatif; la langue romane a fait de même à l'égard des féminins, rosas, donnas. Mais il est incontestable que, dans l'italien, la plupart des mots de la troisième déclinaison au singulier sont formés de l'ablatif latin; vergine, par exemple, est l'ablatif latin VIRGINE en autant de lettres. M. Raynouard le nie en conséquence d'une thèse plus générale que je vais examiner tout-à-l'heure. A l'égard des substantifs latins dont le nominatif est irrégulier, et qui s'accroissent d'une syllabe dans les cas obliques, toutes les langues dérivées du latin ont donné la préférence à un cas oblique quelconque. Et pourquoi? parce que tous les cas obliques pris ensemble étant

d'un usage plus fréquent que le nominatif, la forme du substantif commune à tous ces cas s'étoit mieux imprimée dans la mémoire de ceux qui ne savoient pas le latin d'une manière savante. Puisque nous voyons par les diplomes qu'à cette époque, même en s'efforçant d'écrire le latin régulier, on employoit les cas à tort et à travers, disons que le peuple, qui

parloit la langue vulgaire, ne savoit pas trop exactement quel cas latin en particulier il tronquoit en rejetant les finales.

M. Raynouard emploie le nom de langue romane d'une manière générale et absolue. Il n'en admet qu'une seule. Il soutient que, lors de l'altération du latin, cette langue, telle qu'il nous la fait connoître, a été parlée d'abord dans toute l'étendue de l'empire occidental, et que ce n'est que plusieurs siècles après cette époque que, dans les différentes provinces, l'italien, l'espagnol, le portugais et le françois ont commencé à prendre leur caractère particulier. Il considère donc la langue romane comme un intermédiaire entre le latin et les diverses langues modernes qui en dérivent. Je l'avoue, à cet égard ses argumens ne m'ont pas convaincu.

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Arrêtons-nous d'abord à ce nom de langue romane. M. Raynouard en donne une grammaire.; M. Roquefort a publié un glossaire qui porte également pour titre Glossaire de la langue romane. J'ouvre les deux livres, et je vois qu'il s'agit d'idiomes essentiellement différens : la grammaire se rapporte à la langue des Troubadours; le glossaire, au vieux françois parlé, au nord de la Loire seulement, pendant les douzième, treizième et quatorzième siècles. Lequel de ces deux savans a donc eu tort ou

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raison d'employer le nom de langue romane? Ils ont eu raison l'un et l'autre; mais ce nom est géné– rique, et demande des déterminations ultérieures. Nous avons vu que les conquérans de l'empire occidental appeloient Romains les habitans de toutes les provinces indistinctement. En conséquence, l'idiome populaire reçut partout le même nom de roman. Ce nom fut transféré même aux poésies et aux livres composés en langue vulgaire, et les romans françois de chevalerie en prirent leur dénomination aussi bien que les romances espagnoles 23. Lorsque les auteurs latins du moyen âge parlent de LINGUA ROMANA, ils peuvent donc entendre par-là des dialectes fort différens, selon l'époque et la province où ils vivoient 24. Ensuite, quand ces dialectes furent cultivés littérairement, ils prirent le nom des provinces qui étoient le siége principal de leur correction et de leur élégance: langue provençale, langue toscane, langue castillane. Il y a quelque difficulté à bien désigner la langue des Troubadours. Les noms de langue provençale, limousine, catalane, qu'on lui a donnés, sont trop étroits, parce qu'ils n'embrassent qu'une des provinces où elle étoit indigène, et qu'elle avoit un territoire beaucoup plus vaste. D'un autre côté, le nom de langue romane est trop indéfini.

M. Raynouard a prouvé jusqu'à l'évidence que l'origine des dialectes romans est beaucoup plus ancienne qu'on ne l'a supposée communément. Il en trouve des traces non équivoques dès le commencement du septième siècle. Il me semble aussi avoir établi, avec une grande probabilité, que le dialecte qui s'est conservé jusqu'à nos jours dans le midi de la France, a été jadis commun à la France entière. Il n'y a point de difficulté à admettre cela. Le françois, même le plus ancien que l'on connoisse, est à une distance beaucoup plus grande du latin que le provençal. Le françois paroît donc devoir son origine à une seconde altération du langage populaire, après la première, causée par l'établissement des Goths, des Bourguignons et des Francs dans les Gaules. Mais à quelles causes faut-il attribuer cette seconde altération? C'est une question assez problématique. Je pense que l'établissement des Normands dans une province du nord de la France, et l'autorité de leurs princes, étendue successivement sur les provinces voisines, y a puissamment contribué. Quoi qu'il en soit, la séparation des deux dialectes a dû commencer de fort bonne heure, probablement dès le dixième siècle; car, bien que dialecte du nord s'éloigne en général beaucoup plus du latin que le dialecte du midi, il a cependant

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conservé avec la langue mère quelques traits de ressemblance, qui sont déjà effacés dans les plus anciens écrits provençaux. L'orthographe françoise, et cette orthographe nous peint l'ancienne prononciation, a conservé, par exemple, dans les verbes, le T final des troisièmes personnes du pluriel. On écrit en françois : ils entendent, INTENDUNT, et en provençal, entenden. Les plus anciens manuscrits provençaux offrent encore quelquefois cette consonne finale; mais l'usage général la supprime.

Selon M. Raynouard, l'Italie et les Espagnes auroient aussi éprouvé une semblable révolution, en vertu de laquelle la langue romane, parlée partout dans ces pays telle qu'elle s'étoit formée en France, se seroit transformée en italien, en espagnol et en portugais. Il est difficile de lui opposer des preuves positives, parce qu'on a commencé fort tard à écrire ces langues, et que leurs plus anciens monumens ne remontent, comme je l'ai dit, qu'au treizième siècle, ou tout au plus à la dernière moitié du douzième. Or, d'après la supposition de M. Raynouard, le second changement dans les idiomes de ces pays auroit eu lieu beaucoup plus tôt. Mais cette hypothèse est contraire aux analogies que nous pouvons observer dans l'histoire des langues. Celles qui sont nées de la corruption d'une autre langue s'é

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